ELENA (Andreï Zviaguintsev, RUS, 2011, 109min) :
Ce sombre drame social épuré raconte le destin d’Elena et Vladimir, un couple de personnes âgées, issu de milieux différents, (la femme venant d’un milieu modeste et le mari d’une classe aisée) dans l’ère postcommuniste. Le metteur en scène opte pour une œuvre plus humble sans renier sa méticulosité formaliste, ses virtuoses plans-séquences captivants, l’élégance de ses mouvements de caméra pour mieux mettre en valeur un scénario machiavélique et ambigu. Ce long métrage résonne comme une pertinente métaphore de la situation économique de la Russie ou l’écart de niveau social entre les époux va engendrer une situation qui va modifier inéluctablement les rapports au sein du couple. Une intrigue dostoïevskienne non dénuée de suspens, qui dresse un tableau amer de la société russe, en utilisant les espaces de manière architecturale et signifiante dès le premier plan, comme un oiseau de mauvais augure sur un arbre desséché. Une sourde lutte des classes déclinée avec langueur où le pouvoir de l’argent engendre la perte de toute moralité. Une œuvre cynique portée par l’interprétation magistrale de Nadezhda Markina dont le visage exprime toute l’ambiguïté et la force scénaristique dont la partition musicale entêtant de Philip Glass scelle définitivement le funeste récit. Un thriller social glacial aiguisé comme une lame. Superbe et terrifiant.