Suite de la première adaptation de la série Equalizer par Antoine Fuqua, cette suite du même Antoine Fuqua tente un "effet Fallout", sans réelle réussite, n'était une scène dantesque qui porte à elle seule tout le film.



The Adaptator



Pour exprimer là ce que je n'ai pas écrit au sujet du premier film, l'Equalizer d'Antoine Fuqua n'est pas l'Equalizer. En lieu et place du Robert McCall de Edward Woodward, un Equalizer sortant de l'ombre, vêtu de son costume à la James Bond, de son imperméable imposant, un PPK au poing ganté que son ex-patron "Control" tente de faire rempiler, on se trouve face au Robert McCall de Denzel Washington, un Equalizer qui joue les Monsieur-tout-le-monde, troquant la discrétion contre le comportement du brave type paumé, le costard et l'imper contre des fringues interchangeables et un béret et le PPK contre une sorte de Reader Digest et une montre qui sert son rituel d'attaque hérité d'un Brian Mills ou d'un Jason Bourne.
Si le film ressuscite une série oubliée, il fait le choix absurde d'en profiter pour transformer le héros en homme noir, mûr et athlétique quand on attendait plus un Michael Caine ou un Daniel Craig, par exemple. Pourquoi ne pas avoir méditer le choix du Five Fingers de David Heddison qui remplaçait l'Ulysse Diello de James Mason par son Victor Sebastian, adoptant une nouvelle posture, un autre maintien, avec une autre identité mais sous le même nom de code ?


Dans la série, McCall agit toujours sur deux fronts en même temps: celui de l'espion, occupé par des affaires dépassant la simple juridiction de la police, et celui du justicier, qui agit là où les civils sont menacés sans que es forces de l'ordre ne daignent se déplacer.


Dans le premier opus de son reboot cinématographique, Fuqua avait eu l'idée géniale de faire se rejoindre les deux fronts en un seul, créant de ce fait une histoire simple, aisée à comprendre et aux enjeux renforcés par la double nature du tort à redresser. Manquait la célèbre voiture de l'Equalizer et les multiples intrigues.
Dans le second, Fuqua a décidé de ramener la voiture, reconvertissant pour ce besoin McCall en Lyft-Driver. Robert McCall, s'il est toujours l'homme au béret qui regarde sa montre avant de casser du truand condescendant, ressemble bien plus à celui de la série. Le problème se situe plutôt dans son choix de retrouver l'esprit des pistes narratives multiples, en grossissant le trait.



L' "Effet Fallout"



En 2014 et 2015, Fuqua et McQuarrie sortent respectivement The Equalizer et Rogue Nation.
Fuqua prône le renouveau complet, McQuarrie renoue avec les origines de la série qu'il adapte. Les deux films connaissent un grand succès.
En 2018, les deux prodiges tentent une suite en multipliant à l'infini le ressors efficaces de leur premier volet.
Pour Fallout, cela fonctionne, parce que Mission: Impossible s'y prête, le phénomène de poupées russes existant à l'origine en 1966. De plus, le retour de la bande-son originelle, les nombreux clins d'oeil, en font une somme de l'univers adapté. Pour The Equalizer 2, c'est le naufrage ! Car si la série faisait jongler McCall avec deux enquêtes de deux natures très différentes dès son pilote, elle ne multipliait pas à l'infini le nombre de pistes et restait abordable. Elle se payait même le luxe d'allusions hautement cinématographique, comme le sublime pastiche de Psychose de son pilote. Le film de Fuqua, qui avait échappé à l'écueil d'une double piste difficile à conserver dans un film de cinéma, fonce droit dessus à la vitesse-lumière: The Equalizer 2 ne propose pas deux mais environ 4 pistes narratives différentes avec lesquelles il cherche à jongler comme les épisodes de son aînée. On s'y perd aisément et on perd de vue le fil rouge qui unit deux intrigues parmi toutes, censées se rejoindre lors du grand final, qui sera, lui, très inspiré !



Apocalypse now



Et ce final, à lui seul, sauve le film qui semble n'exister que pour l'introduire.
Un moment d'anthologie qui confirme qu'un film peut être très moyen si son final est explosif, grandiose et sublime.
Ce ne sont pourtant pas les tenants et aboutissants menant jusqu'à lui qui feront sa grandeur.


Cette histoire d'anciens collègues espions devenus des tueurs à gages, qui confirme la volonté de Fuqua d'envoyer valser l'organisation de "Control" - si essentielle dans la série mais sans doute trop proche, de par le nom de son dirigeant, à celle de Max la menace, ce kidnapping tout à fait opportun de la jeune recrue de McCall pour faire pression sur lui, tout n'est qu'irrespect pour le matériau d'origine et simplicité d'écriture.


Ce sont les circonstances de ce duel à un contre mille, digne d'un western, dans une tempête dantesque, sous une pluie d'enfer, dans un village abandonné du fait des intempéries et qui est le village où McCall est devenu l'Equalizer, qui font de cette scène une scène d'anthologie. Ce n'est pas juste un savant mélange de Skyfall et du Jour d'après façon Il était une fois dans l'Ouest: c'est une révélation de la véritable nature de l'Equalizer. Enfin, McCall quitte ses oripeaux d'individu lambda jouant les éducateurs pour civils en rupture ! Enfin, McCall redevient cette ombre du générique de la série, cette menace palpable qui fait trembler de peur ceux qui le traquent et bénéficient de l'avantage du nombre ! Une sorte de Batman, sortant de l'ombre pour mieux frapper les traîtres, les gangsters, les harceleurs, les violeurs, les tueurs !
Un final sombre, dantesque, palpitant, qui tient le spectateur en haleine ! Le même spectateur qui finissait par s'endormirent devant le jeu de poupées russes incohérents et mal maîtrisé du reste du métrage.
D'une intensité rare, le combat final justifie que l'on visionne le film. Aussi, que ceux qui ne se sentent pas de voir ce film n'aille voir que ce passage et ce passage uniquement.



The Frenhofer



Si le nouveau McCall aurait pu être un autre Equalizer parfais en portant un tout autre nom, ne boudons pas le plaisir de voir revenir certains des attributs de l'original.
Le fouillis des intrigues rendues inextricables peut plaire à qui aime les défis, déplaire à qui souhaite se détendre ou simplement se déconnecter mais la scène de combat au beau milieu de la tempête du siècle vaut bien que l'on se triture les méninges ou que l'on dorme durant les trois autres quarts du film.

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le 23 nov. 2018

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Frenhofer

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