Fellini nous livre dans ce film un portrait splendide de la capitale italienne. Entre flamboyance et décadence, le réalisateur développe ici une vision tant personnelle qu’universelle de cette « grande beauté ». Le film, sans concession, oscille en permanence entre le grotesque et le sublime. Il nous entraine dans un périple à travers le temps et nous permet de saisir toute la vie et les passions du quotidien des romains.
Derrière les façades millénaires de la ville se cache tout un microcosme qui explose dans toutes les directions. On retrouve dans ce film tout le caractère et l’énergie débordante des italiens. La rue se transforme au quotidien en scène de théâtre, dans la continuité de la commedia dell’arte. Les restaurants, le music hall sont autant de scènes ouvertes : une histoire et des dialogues spontanés se créent derrière les mouvements de la caméra qui suit la foule et les groupes qui se forment.
Rome est la ville des illusions déçues et une nostalgie s’instaure souvent tout au long du film ; c’est le cas lorsque la vieille aristocrate me en scène un défilé de mode pour le clergé. Derrière les apparences se cache une fragilité qui peut être physique. Il faut reconstruire sur le passé et parfois celui-ci resurgit brusquement comme lors de la découverte des fresques romaines dans les sous-sols de la ville lors de la construction du métro.
Loin des lieux communs, c’est dans le cœur même de Rome que nous entrons. Dans ce film se côtoient acteurs, ouvriers, aristocrates, prostituées et membres du clergé. Rome est à la fois le centre religieux de la chrétienté et le berceau de l’art européen. Seule la caméra de Fellini pouvait saisir les mutations profondes que la capitale a connues depuis les années 1950. Le film nous montre en effet des lieux populaires qui ont marqué ses habitants au travers de personnages attachants qui ne sont pas sans rappeler ceux du Casanova ou du Satyrion par leur extravagance et leur physique.
Le film est au fond très néo-réaliste : Fellini utilise de nombreux acteurs non professionnels et il réussit à filtrer la réalité ; ce filtre lui permet de condenser l’activité fourmillante de la ville en quelques scènes très fortes. Dans Fellini-Roma, les scènes sont découpées autours de plusieurs lieux tout en suivant le parcours d’un jeune homme de province qui vient s’installer à Rome. A travers ce personnage, le spectateur s’initie lui aussi à la vie romaine.