Je vis seul dans un appartement Ikea, je n'arrive pas à dormir, je côtoie des groupes de personnes malades, je n'ai pas de nom, je, c'est le narrateur, c'est Edward Norton, personnage solitaire qui se nourrit du malheur des autres pour trouver le sommeil et se vider la tête. Mais ça c'est avant qu'il fasse sa rencontre, «sa» c'est Tyler Durden (Brad Pitt), l'exact opposé du narrateur : libre, parfait, insouciant et anarchiste.

C'est avec lui qu'ils montent le fight Club : club privé organisant d'âpres combats libre prônant la violence comme échappatoire à un quotidien dont tous les participants souhaitent se détacher, même le temps d'un combat. David Fincher a toujours eu une fascination pour la chair, peu importe les raisons, ni les inspirations, elles ont toujours fait avancer le cinéaste dans ses intrigues. Dans Seven le tueur prend un malin plaisir à manipuler la chair dans chacun de ses crimes, or ici tout n'est qu'une question de chair, le corps tout entier comme outil de violence et de sexe, porté jusqu'à son extrémité. Le corps est malmené, balancé, esquinté et se conçoit comme une expiation des frustrations, des peurs et du dégoût pour une société guidée par la dictature du bon comportement, de la bonne idéologie et du bon fonctionnement. Cette vision c'est celle de Tyler, c'est celle du Fight Club, la violence comme réponse à toute la négation qu'engendre la société vis à vis des gens qui la font vivre, une vengeance par le corps et l'esprit.

Il n'est aussi jamais question de corps sans l'esprit, chez Fincher rien n'est effectué par hasard, tout à un but, on est tous guidés par quelque chose, par un objectif ou par quelqu'un. Et c'est là qu'intervient Tyler Durden (un Brad Pitt tout en prestance et en présence animal voir bestiale), il est le pilier du film, celui par qui tout passe, celui que tout le monde admire et qui au fur et à mesure rentre dans une idéologie des plus extrême. Fincher évoque la perte de contrôle face à la liberté absolue guidée par une idée basée sur la violence et la peur, la critique de la gouvernance par la peur prend ici tout son sens, elle est sous entendue, évoquée et traitée avec force et violence.

Le réalisateur met en scène cette folie montante avec énergie et nervosité, la musique va dans le même sens, il utilise à merveille ses deux acteurs principaux, Norton et Pitt, comme s'ils en étaient à leur dixième collaboration. Fincher tape encore fort et pourrait résumer la folie de son film à la réplique de son inquiétant Tyler Durden : « C'est seulement quand on a tout perdu qu'on est libre de faire tout ce qu'on veux.»
Nicolas_Chausso
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le 4 juin 2013

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