Micky Ward, ce nom ne vous dit surement rien, et c'est bien normal car c'est un ancien Boxeur Américain de 45 ans qui vit à Lowell, Massachusetts, et détenteur du titre de champion du monde WBU en 2000. Et si le nom de cet ex boxeur fait dorénavant la une de l'actualité c'est parce qu'un film lui ait consacré, par David O.Russel ( Les Rois du désert ) de surcroît, et avec Mark Walhberg pour l'incarner. Mais vous me direz, et avec raison : «pourquoi un tel tapage pour ce simple boxeur ?», et je vous répondrai, toujours avec raison, que la vie de ce Micky Ward est infiniment plus complexe que ça et qu'elle porte en elle le potentiel parfait pour en faire un biopic d'excellente qualité. Et pour ceux qui en émettraient de nombreux doutes au vu de son arrière fond très « boxe », je les rassurerai en leur expliquant que Fighter n'a de sport que son contexte et qu'il évoque des thèmes bien plus profonds et psychologiques que son histoire le laisserait croire.
1993, Massachusetts, Micky Ward est un boxeur naissant promis à un grand avenir. Il est entrainé par son frère, Dicky Eklund, ancienne gloire de la Boxe devenue junkie. Micky vit dans son ombre et dans l'emprise qu'exerce sa mère, sa manageuse, sur lui. Une pression familiale qui pèse sur le boxeur, particulièrement car celui ci enchaine les défaites, ce qui l'amenera à remettre en question ses choix et ses décisions. Comme évoqué plus haut, l'histoire de ce Fighter n'a d'intérêt que par le thème familiale qui la compose, c'est cette raison principale qui a poussée le réalisateur à s'intéresser au récit de la famille Ward et à en faire un film biographique plein d'ambitions. Mais ce n'est surement pas l'unique raison, et c'est le casting qui nous conduit à cette remarque, car en enrôlant Mark Walhberg et Christian Bale pour interpréter les deux rôles principaux, David O.Russel marquait là un grand coup et tenait le binôme presque parfait à ses besoins de réalisations.
Fighter sera très bien interprété ou ne sera pas, car au même titre que « La nuit nous appartient » de James Gray (ou Mark Walhberg était déjà présent) voir du Prix de la Loyauté de Gavin O'connor, O.Russel met davantage en scène l'idée d'une caste familiale que le thème qu'il sous tend, policier pour les deux exemples précédents, sportif pour Fighter. Car hormis le frère drogué et pathétique qui l'entraine, Micky Ward est entouré d'une mère étouffante (épatante Melissa Leo) et de ses 7 surs, un contrôle dont il ne sait se défaire et qui le bloquera autant dans son ascension sportive que dans son émancipation psychologique. De son côté Dicky subit une toute autre emprise, probablement plus difficile et plus dangereuse : la drogue, une terrible influence psychique qui l'éloigna d'un avenir sportif au sommet, si bien qu'il voit dans son frère l'homme qu'il n'a jamais été. Plusieurs sujets sont donc traités au travers de cette singulière histoire, elle évoque les causes d'une passion et ses conséquences (un thème très Aronofskyien d'ailleurs, un hasard si celui ci y figure en producteur et devait, à l'origine, en tenir la réalisation ?), mais elle traite tout autant de l'emprise matriarcale, fratricide ; Fighter jongle avec les notions freudiennes et transcende son simple contexte sportif, un contexte que ne renierai pas un Rocky ou un Ali dont il empreinte les codes de mise en scène, principalement sur ses parties « Boxe », classiques et prévisibles.
Bien plus que sa mise en scène, Fighter est avant tout un film « authentique » porté par l'ambition débordante de son interprète principale, Mark Walhberg, longtemps dans l'attente de voir le projet se finaliser car lui même fan du vrai Micky Ward, l'acteur s'est donc fortement investi physiquement pour coller au mieux à son idole. Un autre investissement physique, et non des moindres, est celui de Christian Bale, cet habitué des transformations physiques (notamment dans The Machinist où il perdit 28kg) réalise une nouvelle prestation d'envergure et nous bluffe constamment, sa performance lui vaudra d'ailleurs l'oscar mérité du meilleur second rôle. L'authenticité du film réside pourtant ailleurs, puisque pour mieux retranscrire la véritable histoire de la famille Ward, l'équipe de tournage s'est véritablement rendue dans la ville de Lowell au Massachusetts ainsi que dans certains lieux communs à l'histoire des deux frères (notamment la salle d'entrainement), de plus Mickey O'keefe, leur entraineur, joue son propre rôle, au même titre que l'oncle, une des surs de la famille et le boxeur Sugar Ray en font de même.
David O.Russel s'est appliqué à soigner son biografilm de A à Z et nous gratifie d'une belle sixième réalisation. En effet, en surpassant le simple cadre de cette histoire vraie le cinéaste parvient à un portrait résolument réaliste et profondément humain de deux frères plombés par leurs dépendances respectives. Bale y est exceptionnel et Walhberg très convaincant, autant de raisons qui font de ce Fighter un très bon moment de cinéma.