Pourquoi Godzilla est-il plus qu'un film de monstres et accessoirement, un putain de grand film.

Aux alentours de fin 2011, on apprenait que Hollywood l'original mettait en chantier un nouvel épisode de Godzilla. Après le film moyen réalisé par Roland Emmerich, c'était l'un des rare remake/reboot, qui mettait la planète cinéma en émois. Oui rappelez vous, le Godzilla de Emmerich, vous savez celui qui ne fait jamais deux fois la même taille dans le film, qui ressemble plus à un gros dinosaure gavé de Blédine, plutôt qu'au Roi des monstres.


Parce que bon à un moment, avec Godzilla faut pas déconner hein. Ca reste le patron, la figure emblématique d'un Japon traumatisé par l'arme nucléaire. En 1954, les Japonais, par le biais de la Toho, crées ce monstre réveillé par la folie humaine, à coups d'armes atomiques. Véritable expiatoire du traumatisme d'Hiroshima , la créature sera déclinée au travers de plusieurs dizaines de films, la mettant parfois en scène aux prises avec d'autres créatures.


Appartenant au départ au Japon, le monstre est ensuite apparu comme une figure universelle, toujours en accord avec son époque et ses peurs.


Alors, même si parfois le Godzilla de Emmerich touchait au but (la présentation de sa créature étant un modèle du genre), ce dernier se révèlera être au final bien trop bancal pour marquer les esprits. Acteurs en roues libres (quelqu'un peut rattraper Jean Reno?) humour bien trop présent et une créature très loin de flanquer la trouille, le tableau est au final, passablement raté.


Alors quand la planète cinéma a entendu le nom de Gareth Edwards comme réalisateur de ce nouvel épisode, la confiance était à son comble. Car oui, Gareth Edwards c'est un premier film, Monsters, qui malgré un budget de 500 000 Dollars, a marqué les esprits. Des personnages fouillés avec de vrais histoires à raconter sur fond de zone infestés d'extraterrestres et on obtient un modèle de films fantastiques, bien loin de tout les stéréotypes du genre.


Mais bon, premier film réussit ou pas, s'attaquer à Godzilla se révèle être une tâche bien plus ardu. Des millions de fans à contenter, des codes à respecter, imposés par la Toho (l'origine de la créature devant être à chaque fois nucléaire). Et puis Godzilla ça doit foutre la trouille. Parce qu'un truc de 106 mètres de haut, ça doit passer pour une menace immense et pas pour un vulgaire danger pas bien méchant.


Et c'est certainement pour commencer, la plus grande réussite du réalisateur. Car même si le traitement de la créature sera assez éloigné d'un exterminateur, pour plus ressembler à un sauveur venu rééquilibrer les choses, dès sa première apparition, on ne peut qu'être intimidé par la présence du monstre. Ce plan totalement dément où des soldats balancent des fusées éclairantes dans le ciel, nous montrant une partie de la créature, se révèlent être une première réussite. Puis au fur et à mesure que l'on découvre la bête, on s'aperçoit que Gareth Edwards a filmé ni plus ni moins qu'un immense hommage en faveur de Godzilla. En effet, il le montre avec un tel plaisir, avec un tel amour de la bête, avec un tel respect, qu'on a envie d'être derrière elle, de l'aider à lutter, d'aller castagner ce qu'il est venu affronter.


Ceci pourra peut-être paraitre être un défaut pour certaines personnes, qui auraient voulus voir le monstre comme une menace et non pas comme une solution pour l'humanité face à autre chose, mais c'est bel et bien la réussite de ce film, de rendre hommage au Roi des montres, de le montrer combattre comme un vieux guerrier. Comme dans cette scène hallucinante d'après bataille, quand le lézard apparait fatigué, presque assis, la tête baissé, en train d'essayer de trouver la force de continuer, tel un boxeur sur le ring. Le boxeur tiens... Certainement l'image la plus frappante, cette envie de faire passer le monstre pour un combattant vieux mais aguerri, avec des postures de guerrier, tout droit sorti d'un Rocky version monstre.


Et puis Gareth Edwards oblige, on a droit à de vrais personnages, dépeint au travers d'une cellule familiale que n'aurait pas renié Spielberg. Spielberg est d'ailleurs assez présent dans le film, Edwards multipliant les hommages à Jurassic Park ou au Dents de la Mer.


Et bien entendu, un film catastrophe Américain ce n'est pas un film comme les autres, 11 Septembre oblige. Cloverfield était déjà un moyen de faire face au traumatisme mais il n'avait pas l'aura d'un Godzilla. Immeubles détruits, combats qui prennent place au coeur de la ville, au coeur de la vie des personnages...Après avoir servi de "psychologue" aux Japonais, Godzilla se met aux services des Américains, montrant encore plus son côté universel dont je parlais plus haut. Un plan comme celui montrant une créature volante flirté avec les vitres d'un immeuble est peut-être involontaire mais l'image restera marquante.


Et puis, en mettant de côté tous ces signes, il reste des scènes de génies absolus, comme cette descente en parachute avec en fond le "Monolythe Theme" de "2001 l'Odyssée de l'Espace". Véritable tableau dépeignant des hommes confrontés à l'inconnu, à la peur absolu, voilà encore une scène qui fera date dans l'histoire du cinéma.


Au final le film ne souffre d'aucun défauts majeurs, peut-être en chipotant, deux ou trois plans qui rendent les SFX un peu trop voyants mais le tout se révèle être une immense réussite, servit par la dernière scène de Godzilla, sous forme d'hommage absolu au guerrier venu accomplir sa mission.


Gareth Edwards signe la plus belle déclaration d'amour aux films de monstres ainsi qu'à leur Roi, en n'oubliant pas les personnages ni le scénario.


Justice est rendue.

Guinness60
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le 3 févr. 2017

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