A bord de la station spatiale internationale, le docteur Ryan Stone observe la terre à travers un hublot. Une musique lente nous fait ressentir l'infinité de l'espace. Ses notes s'étirent et ne semblent jamais vouloir s'arrêter. Notre planète nous paraît si proche qu'on a ce sentiment de pouvoir la toucher. Mais elle est inaccessible. Face à cette immensité remplies de milliers de points lumineux, nous avons une impression d'étouffement. L’exiguïté des couloirs de la station spatiale ou encore pire, celle des casques des combinaisons, où la caméra de Cuaron n'hésite pas à pénétrer, provoque en nous un sentiment de claustrophobie. Le vide spatial ne peut pas diffuser les bruits, les seules choses audibles sont les sons des voix, des respirations, des communications qui obligatoirement se réverbèrent sur les parois des casques. Cette situation provoque en nous un manque de paysages, de grandes plaines ou des environnements accidentés par les forêts et les montagnes terrestres. La vision exaltée d'un paysage, où une multitude de choses à voir nous rassurerait, contrairement à ce vide d'une profondeur sans limite où un monochrome noir parfait, tacheté d'étoiles, constitue le seul décor. Mais on est dans l'espace et le retour n'est possible qu'avec celui des astronautes. La caméra de Cuaron nous nargue constamment en nous montrant cette magnifique planète bleue flotter à proximité dans un néant total. Nous souffrons d'un manque de protection dans cet endroit hostile. Nos repères sont aussi brouillés par les mouvements de caméra incessants et indéfinissables, car les notions de haut et de bas n’existent pas ici.


Le film reproduit fidèlement l'expérience spatiale et les moyens mis en place pour sa conquête. L'humanité est à un moment de son existence où elle s'émancipe. Elle est adolescente. Elle se sépare de la protection parentale. La terre est en quelque sorte une mère pour l'humanité, elle l'a nourrie, logée et protégée de l'environnement inhospitalier qui l'entoure. N'oublions pas non plus de préciser que l'humanité est née sur cette terre. Dans l'espace, l'homme se retrouve en position de faiblesse. C'est le cas de nos deux personnages, qui après la destruction de leur navette par des débris, doivent retrouver un moyen de rentrer sur terre. Le pilote Matt Kowalsky et le docteur Ryan Stone, qui est à la limite d'étouffer (non pas à cause de la réalisation, mais à cause du manque d'oxygène), estiment que leur seule chance de survie est de rejoindre la station spatiale internationale.


Le film s'attarde plus particulièrement sur le personnage de Ryan. La quête de sécurité et donc du retour sur terre de cette femme est une recherche de la protection maternelle. Un retour au point originel. Lors de son entrée dans la station l'envie de sûreté est telle qu'elle se remémore corporellement l'endroit le plus sûr qu'elle connaît. Une fois dans le SAS ses jambes se plient doucement contre son corps, qui tourne très lentement sur lui-même en apesanteur. Un tuyau se décroche de la paroi et viendra alors évoquer le cordon ombilical de ce fœtus.


Le personnage de Ryan est en quête de ce retour sur terre, pourtant elle est aussi comparée à la planète. Notamment par le reflet de la terre sur la vitre du casque en surimpression sur son visage, mais surtout par le fait qu'elle était elle aussi une mère, qui a néanmoins échoué dans son rôle. C'est un personnage torturé, prêt à mourir pour revoir sa fille. Sa survie ne dépendra que de son envie de vivre. Le film développe une idée de relation maternelle. Celle d'une mère ayant perdu sa fille: La terre a perdu Ryan et Ryan a perdu son enfant.


Gravity nous montre un amour maternel entre Ryan et sa planète, un amour que l'homme peut avoir oublié.


La scène métaphorique de la naissance de l'humanité et de la théorie de l'évolution, vers la fin du film,


fait références ici à une terre pure sans la présence de la pollution humaine. Le film prône un culte de la nature. En nous révélant l'hostilité de l'espace Gravity nous montre aussi l'importance du rôle de notre planète. Il pose des questions sur les liens maternels qui se sont tissés entre l'homme et son habitat. Ce film aborde des sujets écologiques qui nous mènent, en voyant cette planète et cette importance qu'elle a pour les astronautes, à s'interroger sur sa fragilité et l'importance de son équilibre naturel.


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le 12 juin 2017

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