Film catastrophe - Bilan : Un dernier quart d'heure catastrophique
Une banale mission spatiale tourne au cauchemar pour trois spationautes aux prises avec un télescope en panne. La myopie de Hubble, tout le monde connait. Les as de l'espace, tout le monde connait aussi. Ces histoires sont devenues tellement banales qu'on ne les écoute plus que d'une oreille distraite. Tout a l'air si bien huilé dans la mécanique de l'ISS... Et pourtant ! Moins nombreux sont ceux qui se préoccupent déjà de la ceinture de déchets en orbite autour de notre planète, qui parasite et complique parfois la mise en place de nos réseaux de satellites... C'est sur l'hypothèse que ces débris pourraient un jour menacer l'intégrité des installations orbitales que s'appuie tout le scénario du film. Cela donne une histoire épurée de survie en apesanteur... Du moins au début.
Les images sont de toute beauté. La mise en scène est captivante : Cette fois, ça y est, on flotte dans l'espace, dans notre scaphandre de spationaute. Si on a la chance de profiter d'une 3D de qualité, l'immersion est encore plus forte. Fermez les yeux, vous allez prendre une avalanche de débris en pleine tête. La mission spatiale, de grisante à donner le tournis, se fait soudain terriblement stressante. Le danger arrive.
Survient tout à coup la pire hypothèse de votre existence. Celle que vous n'auriez jamais envisagé lorsque, enfant, vous rêviez à votre future carrière spatiale : et si je mourrais là ? tout seul, perdu, flottant à des dizaines de milliers de kilomètres de la terre ferme, que j'aperçois pourtant là-bas, en bas, en haut, à six heures, dans mon dos... peu importe ? Le film prend une ampleur dramatique et vous vous sentez cloué sur votre fauteuil, condamné à subir les non-éléments. Pas de son. Pas d'oxygène. Pas de repères. Et puis dans un dernier sursaut, l'adrénaline vous remet les idées en place. L'entrainement de six mois sur terre, en piscine, en centrifugeuse, en vol parabolique... Tout vous revient. Vous trouvez la ressource inattendue. L'instinct de survie. Sauvé !
Et là vous pensez que vous avez vécu un moment extraordinaire, et qu'il est temps que le fondu au noir fasse apparaitre le générique de fin...
Perdu ! Retour brutal sur terre, dans votre cinéma habituel, avec un fauteuil qui recommence à gratter vos fesses et une jambe qui tire... Le dernier quart d'heure qui gâche votre séance vient de commencer. Gravity, quand tu nous tiens ! On revit deux fois les mêmes scènes dans deux contextes différents. La catastrophe n'en finit plus d'être catastrophique, et la surenchère commence. L'héroïne qui sauve sa peau n'est plus une héroïne, c'est Batgirl, c'est Supergirl, c'est la fille qui court le 100 mètres en 9 secondes et demie dix minutes après une césarienne et qui échappe à la chute d'un vaisseau en flammes de 150 millions de tonnes de Prometheus... Sandra Bullock, il faut le savoir, sous son apparence toute frêle, résiste à tout, même à l'eau et aux flammes. Il faut dire qu'elle joue de l'extincteur comme personne...
Ah, oui, notons-le au passage, pour plus tard : l'extincteur, c'est le couteau suisse de l'espace !
Quel dommage d'achever un film avec une telle exagération dans l'invraisemblable... Je ne peux malheureusement pas l'écrire ici, sous peine de révéler les scènes clés de la fin, mais j'ai ressenti un énorme gâchis. On débutait dans un réalisme à couper le souffle, on termine dans un semi-fantastique totalement hors de propos. Sortez le parachute, la capsule Soyouz construite sous licence en chine fait sa rentrée dans une basse atmosphère saturée de grand spectacle à effets pyrotechniques tendance kitch-Las Vegas.