A aller voir en 3D, car rarement l'expérience n'a été aussi impressionnante (la nausée m'est vite venue ...), Gravity offre un voyage vertigineux. Dans l'espace bien sur, qui est ici un lieu hostile dans lequel on étouffe et dont on veut sortir. Mais aussi et surtout dans la vie humaine. L'air de l'espace semble en effet être propice au spectateur pour réfléchir sur des questions aussi existentielles que la naissance, la vie, la mort, la place que l'on occupe sur terre. Rien que ça.

Ce voyage, je n'étais pas franchement motivée à en faire partie. Malgré ce déferlement d'avis positifs, de "film du mois" dans les magazines, de "chef-d'œuvre de l'année" placardé partout, j'étais réticente. Ma première peur, l'ennui, a vite été rassurée : pas une seconde je n'ai lâché l'action (si, juste une peut-être j'avoue, mais vraiment de façon raisonnable), le suspens nous tient, de façon étonnante. On voit rarement à l'avance ce qui va nous attendre. C'était aussi ma seconde peur : après ce choc monumental annoncé par la bande-annonce qui laisse planer le mystère sur l'action, je craignais que le film s'enlise. Que nenni !
En fait, j'ai trouvé bien plus dans ce film que ce a quoi je m'attendais. Il est en effet traversé de moments de grâce, scientifiquement improuvés à ce jour. J'ai aimé cette façon que les astronautes ont de regarder la Terre, qu'ils voient dans son intégralité, comme pour se rassurer. J'ai aimé voir leurs visages illuminés par l'aube, certaines répliques ultra-poétiques y faisant référence. J'ai aimé ce moment ou Sandra Bullock enlève sa grosse combinaison et dévoile son corps tout mince, si simple dans son shorty et débardeur. La façon qu'elle a à se replier comme le fœtus (référence appuyée, encore une, à 2001 : L'Odyssée de l'espace, ce qui est attendu, ce qui va presque de soi), les tuyaux du vaisseau étant un cordon fragile qui la maintient en vie. Ce mal-être que la femme exprime quand elle parle de sa vie sur la Terre. Cette coupure avec sa planète, cette impossibilité de communiquer, personne ne l'entendant jamais quand elle essaie d'établir un lien avec la Terre. Et LE point qui tue, celui qui m'a fait mettre un 8 au lieu d'un 7, c'est le personnage interprété par Clooney. Bon, déjà parce que George en 3D, ça ne se refuse pas. Mais aussi parce qu'il apporte une légèreté dans certains moments, une sorte d'assurance rassurante, et un gout amère après sa disparition. Il a la responsabilité des plus belles répliques. Sa relation magnétique avec Sandra B est très belle, et heureusement d'ailleurs qu'elle n'est jamais réalisée (ç'aurait été beaucoup trop simple, et les voir s'embrasser avec leur scaphandre, je crois que ça aurait cassé l'émotion, je vous laisse imaginer la scène comique qu'on aurait vu ...) Sa réapparition dans une hallucination bienvenue ("GEORGE MIRACLE TU ES VIVANT TU VAS NOUS SAUVEEEER !" s'entend-on penser avant de comprendre que l'on s'est fait bernés) est d'une grâce indescriptible. En fait, George est lié à tous les moments que j'ai le plus aimé, il donne une couleur particulière au film. Bon, on ferme les yeux sur le fait qu'encore une fois, ce soit l'homme qui sauve ce boulet de femme à laquelle il arrive toutes les catastrophes possibles, bien que ce soit compensé par le fait que ce soit la femme qui survive au final ...

Un (gros) bémol en revanche : tous les détails bien cuculs, bien gnangans, bien américains. La photo de famille qui plane à côté du premier cadavre, passe encore. Ca peut même être un peu émouvant. Mais alors le coup de la mort de la petite fille de 4 ans : NON ; et le discours que fait la survivante et qui dit au mort "tu croiseras une fillette aux cheveux en bataille, dis-lui que je l'aime, dit-lui que maman lui fait de gros bisous" : NON DE NON ! Je ne dis pas non à certains moments d'émotion, c'est très beau quand elle entend la voix du chinois, les pleurs du bébé, les aboiements du chien ... La faire aboyer, pourquoi ? Remarque, pourquoi pas ? Mmh. Ca aura au moins eu le mérite de faire rire une salle pleine de centres de loisirs, les enfants adorent voir des adultes faire "wouf wouf". Quant à la fin, elle parait énorme. Mon voisin m'a soufflé qu'il aurait préféré qu'elle meurt noyé, elle aurait réussi à survivre à l'espace et à peine arrivée sur Terre elle mourrait. C'est un peu sadique, mais je me demande si il n'a pas un peu raison au fond. On fermera également les yeux sur tout, l'aspect scientifique du film, on dira que les astronautes sont très résistants, qu'ils n'ont besoin ni de manger, ni de boire, ni de dormir, ni d'aller aux toilettes. Trop forts !
Je pointe ces éléments car je les trouve soit drôles, soit contestables, mais ils ne gâchent qu'à ... 5% ... 10% le film d'une beauté visuelle et émotionnelle époustouflante. Oui, j'ai senti les larmes monter, et j'ai été illuminée par des moments de perfection.

1h30, c'est la cadence à laquelle les pluies de météorites tombent dans l'espace. C'est aussi la durée de Gravity, pluie de questions et de chocs successifs, ovni posé par une belle après-midi dans mes yeux.
Azilys
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le 30 oct. 2013

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Azilys

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