Prix de la mise en scène à Cannes en 1997, Happy Together est une formidable claque esthétique, produit d'un alliage aussi malicieux qu'intelligent entre mouvements, burlesque et silences. Récit à l'autre bout du monde de deux amants Hongkongais, le film prend place en Argentine dans une atmosphère chargé pour ne pas dire saturé et qui rappelle parfois Paris, Texas de Wim Wenders pour les couleurs, ou encore les photographies cubaines d'Alex Webb pour l'ambiance. À ce titre, le travail colorimétrique réalisé par le réalisateur et son équipe est proprement splendide. Certaines scènes sont mémorables et les plans d'Hong Kong à l'envers, des chutes d’Iguaçu ou encore du tango lent entre les deux amants resteront peut-être comme certaines des plus belles filmés par le réalisateur.
Du côté de l'écriture, celle-ci, sans être inoubliable, nous conte les aventures de ces deux amants, de leurs coups de chaud et de leurs coups de sang, sans jamais nous ennuyer. Ce thème de l'amour passionnel et sanguin est cher au réalisateur, et l'on retrouve ici certaines ficelles déjà entraperçue dans Chungking Express et Les anges déchus, notamment les répétitions musicales pour souligner les intermèdes. En ce sens, Wong Kar Wai en use de façon entêtante, et préfigure par là toute la grâce de son chef d’œuvre en devenir, qui sera d'ailleurs le prochain film qu'il réalisera, l'immense In the mood for love.