C’est de manière frontale que le film arbore la douleur d’une femme confrontée à la perte violente de ses proches. L’approche est sincère et personne ne remettra en cause la performance de Diane Kruger (qui avait déjà un rôle en or dans Sky) ; pourtant, In The Fade ne s’inscrit pas seulement dans la quête des victimes à trouver le réconfort, car le film choisit sciemment sa propre justice. On aurait alors plus facilement pardonné les sautes d’humeur d’un réalisateur appuyant, souvent trop fort, sur les préjugés. Sa Katja reflète symboliquement une forme de cliché entre la femme tatouée et droguée, pour mieux fustiger une police contrainte de faire son boulot, peu importe les pistes. On sent donc le réalisateur bien remonté contre la justice de son pays, le procès en est d’ailleurs la parfaite représentation : dur, il aborde néanmoins la douleur de la victime sous un aspect neutre et plus enclin à chercher la vérité qu’à réconforter la partie civile. Le film donc se maintient jusque là, certes dans une facilité empathique vis à vis de Katja, mais surtout dans sa trajectoire de victime affrontant l’après. Mais par la suite le film bascule dans un autre genre, et alors la volonté de Diane Kruger de faire parler les victimes vole presque en éclat par son geste, compréhensible mais peu exploré. Si on accepte de passer dans un genre de vengeance c’est surtout par attrait pour Katja, qui tient le film de bout en bout.
Déjà, la scène de la baignoire, hautement symbolique, force le trait ; on en est pas moins surpris que Fatih Akin décide de trancher dans le désespoir, quitte à tout perdre, au grand dam d’une sortie plus posée et réfléchie de ceux qui luttent encore après avoir tout perdu. Fatih Akin voulait remettre l’humain au cœur de la justice, il en arrive à déshumaniser son propos, efficace mais loin d’une approche sensible.