Depuis les Beaux Gosses, je me suis juré de descendre Riad Sattouf, surtout à partir du moment où cette horreur cinématographique a franchi haut la main les portes du succès. Et non, on en dira ce qu'on veut, Les beaux gosses, ça ne valait pas un clou. C'est d'ailleurs assez drôle de voir que les mêmes qui le défendaient corps et âmes, m'insultaient devant mon refus d'accepter cette insulte à l'art, sont aujourd'hui absolument incapable de me raconter le scénario ou de me décrire une scène qui les avait alors marqué. Un pet dans le vent total, qui peut divertir lorsque l'on est pas trop exigeant, mais que l'on a oublié dès le lendemain.

Alors, pourquoi Jacky et le royaume des filles suscitait une certaine curiosité ? Parce que le concept est assez fantastique. L'inversement des rôles, la castration du patriarcat pour créer une société où tout est dominé par les femmes, l'ablation de nos "codes" ridicules au profit de , peut-être, une critique intéressante. Mais en voyant Vincent Lacoste dans le rôle titre, on se dit déjà qu'il va y avoir un sérieux souci. Son "jeu", consistant à tenter de faire des pauses, changer de ton de voix à chaque phrase parce que la précédente est désagréable, ou à balancer un rire gras toutes les deux minutes, n'a pas changé. Quoi, pardon, il est beau ? (je dis cela, je ne l'ai pas réellement entendu, bien heureusement, mais je me rappelle avoir vu le "fan club officiel" du jeune homme lors de l'avant-première des Beaux gosses, véridique !) Depuis quand cela a-t-il un quelconque intérêt ? Ah oui, j'oubliais, depuis toujours.

En bref, au lieu de s'intéresser à une société qui mériterait un développement, tout tourne autour de Jacky, qui ne veut qu'une seule chose, c'est s'envoyer la future chef d'état. On ne fait donc que le suivre bêtement, regardant ses péripéties sans grand intérêt puisqu'à part, une fois de plus, pour un adolescent en mal-être (et encore, faut que ce dernier soit sacrément idiot), il est impossible de se sentir proche du personnage. Les personnages secondaires, particulièrement les autres gamins qui essaient de suivre à la lettre le jeu d'acteur de Lacoste, n'en ayant pas eux-mêmes (ça en dit on sur la direction...), n'aide en rien à la construction d'un univers autour de Jacky vu leur manque total de caractère. Que personne ne se permette de mentionner Didier Bourdon comme un atout. On suit donc péniblement Jacky au travers de sa quête sexuelle, dans ce qui est donc, à la ligne de scénario près, une copie conforme des Beaux gosses dans un autre univers.

Il est donc toujours aussi difficile de comprendre ce qui peut bien faire le soi-disant charme de Riad Sattouf. Ce dernier devrait mieux s'entourer, l'idée de renverser les codes dominants est un filon à exploiter, et jeter Vincent Lacoste dans une benne. Ici, la seule exploitation de l'idée principale a été de se dire "tiens, et si une femme disait ça à la place d'un homme ?", ce qui n'a pas grand intérêt. Tout comme de déclarer les chevaux divinités sans vraiment en expliquer le sens, qui même ridicule aurait été un certain atout pour l'intrigue. C'est pas aujourd'hui que tu feras du cinéma de qualité, cher Riad.
ThierryDepinsun
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le 17 févr. 2014

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