Rupert Goold, réalisateur de Judy, arriva au cinéma avec un film intitulé True Story. Cinq années plus tard, Goold s’attarde sur l’hiver 1968 de la légendaire Judy Garland qui débarque à Londres pour se produire à guichets fermés au Talk of the Town. Biopic flamboyant, oscillant entre passé angoissant et présent schizophrène, le réalisateur tente bravachement de nous dépeindre la true story de l’interprète d’Over the Rainbow. Mal lui en a pris car cette peinture caricaturale agrémentée de paillettes sent l’histoire réchauffée.
À la cuisine des artistes biopisés du cinéma hollywoodien dont Bohemian Rhapsody est l’un des derniers exemples en date, Judy coche tous les ingrédients d’une narration vue, revue, avalée, déglutit et resservie : un élément déclencheur qui explique les tourments d’un artiste, quelques grands moments de consécration, une chute abyssale et longue parsemée d’éclaircies, des luttes quotidiennes entre ancien mari et garde des enfants, de la consommation d’alcool, de la drogue, une dose conséquente d’idéale et un brin de personnages secondaires non-écrits. Malgré le rayonnement de Renée Zellweger et la vie extraordinaire de l’artiste, le réalisateur manque d’originalité pour raconter une true story à laquelle il est difficile de croire. Quitte à faire du cinéma, autant jouer avec les faits et embarquer le spectateur. Las, l’histoire racontée tombe dans les méandres de l’ennui, jouant d’allers-retours entre la cause de son instabilité qui viendrait uniquement et simplement de la société de production et de distribution Mayer et de l’homme qui en est à sa tête, allant presque jusqu’à en faire un prédateur sexuel, alors que c’est sa mère qui l’a entraîné dans une mécanique infernale de répétitions et de représentations théâtrales dès son plus jeune âge, en l’initiant également à la prise de médicaments pour qu’elle puisse tenir le coup. L’écriture brouillonne des seconds rôles entache les personnages qui entourent Judy, seul le couple homosexuel, ressort comique et émotionnel, fait bonne figure à côté d’un ex-mari, d’une assistante et d’un musicien (autres ingrédients de la recette) sans âme. Les carottes sont cuites, la recette est somme toute banale. J’aurai préféré mettre les pieds dans le plat plutôt que de casser du sucre sur le dos de ce film…