Dinosaures génétiquement modifiés et vie de famille.

Je n’ai jamais était un grand fan de Jurassic Park. Je n’ai jamais allumé la télévision en rentrant de l’école, une tartine de Nutella dans une main, un verre de jus d’orange dans l’autre, débordant d’excitation à l’idée de revivre les aventures de cette île fantastique. Je n’ai jamais était fasciné par ces créatures merveilleuses broutant paisiblement l’herbe sous le ciel bleu d’une île gentiment posée au milieu de la mer, ni terrifié par ces monstres immenses tout en dents et en écailles lancés dans une furie meurtrière au cœur d’une jungle ruisselante et boueuse, plongée dans le noir. Et pourtant j’aurai aimé. Mais je n’ai jamais à accroché à une histoire que j’ai toujours trouvée d’une niaiserie incroyable. Spielberg avait pourtant réussi à créer une ambiance unique, quasi féerique, débordant de l’émerveillement enfantin de voir revivre ces majestueuses créatures éteintes depuis des millénaires. 22 ans plus tard, le parc jurassique est de retour dans un Jurassic World toujours plus niais qui ne parvient jamais à retrouver cette magie enfantine, à retranscrire la fascination d’un monde impossible. La fascination des géants préhistoriques. La fascination des dinosaures.


20 ans après la catastrophe meurtrière de Jurassic Park, l’île a été reconstruite et repeuplée, finalement ouverte au public et enfin couverte de succès. Des centaines de dinosaures vivent au milieu de millier de visiteurs. Pour continuer à se développer, à attirer, à vendre, le parc doit se renouveler, proposer quelque chose de nouveau, de plus grand, de plus fort. D’incroyable. Ce sera un super dino, génétiquement protéiné. Il y des choses intéressantes à imaginer à partir de tout ça. Des situations tendues, de l’action captivantes, des scènes épiques. Il y a aussi des choses intéressantes à raconter. Sur l’homme qui veut en voir toujours plus, sur l’homme qui est prêt à tout pour se remplir les poches, sur l’homme qui se prend pour dieu.


Et bien non. Rien d’intéressant n’est raconté. Rien d’intéressant n’est montré. Rien d’intéressant n’est même suggéré. Au lieu de se défaire de l’ombre pesante de son prestigieux modèle, le jeune Colin Trevorrow vient gentiment s’installer en plein dedans. Et il a l’air tout heureux de le faire. Les 15 premières minutes ne sont qu’un enchaînement de clins d’œil au film de Spielberg. La même musique, les mêmes plans, et un personnage fanboy dans un t-shirt de l’ancien parc qui vante les mérites de son authenticité. Autocritique annoncée.


Regard, bouc et décolleté


Jurassic World reprend surtout une histoire pratiquement identique, qui met en scène des personnages pratiquement identiques, en y ajoutant un dinosaure tueur mutant. Avec Chris Pratt dans le rôle du gentil héros, digne des plus belles parodies à chaque fois qu’il est en gros plan, bouche en cul de poule et regards de braise à foutre le feu à une glacière. Un gentil héros qui doit faire avec un méchant fourbe et opportuniste, avec bedaine généreuse et bouc au poil. Un gentil héros qui protège deux enfants et s'énamoure de leur belle tante rousse, directrice du parc. Une belle tante rousse qui ne vit que pour le travail, mais plus pour très longtemps. Rien de tel qu’une bonne vielle attaque de dinosaures pour faire renaître l’instinct familial. Une belle tante rousse qui dégaine son décolleter luisant de sueur dès que sa vie est en jeu et qui enchaîne les sprints sur talons hauts de 10 centimètre. Fabuleux.


Le Colin veut surtout aller tellement vite et montrer tellement de choses différentes qu’il finit par ne jamais rien montrer. On n’a pas le temps de découvrir le parc, pas le temps de s’attacher à qui que ce soit, pas le temps de ressentir quoi que ce soit. On aurait aimé parcourir cette île sauvage et découvrir ses incroyables habitants. Les contempler se rafraîchir au pied d’une chute d’eau, se nourrir dans une étendu herbeuse qui s’étend plus loin que le regard ne porte ou se déplacer dans une forêt dense où dansent les ombres. Au lieu de ça, les scènes banales d’un blockbuster banal s’enchaînent plus rapidement que les portions de frites dans les friteuses d'un fast-food. Puis les scènes d'action arrivent. La première situation tendue se met en place et on n’a pas le temps de se demander ce qu’il va bien pouvoir se passer qu’elle est déjà terminer et qu’une autre à déjà commencée.


On sait dès le départ qu’une catastrophe va arriver. Puis 5 minutes plus tard comment elle va arriver. Puis encore 5 minutes plus tard comment elle se finira.


Un blockbuster basique, sans imagination et sans mordant.
C’est con, surtout pour un film sur des dinosaures.

Clode
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le 10 juin 2015

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Clode

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