Il paraît que la sagesse s'acquiert avec l'âge. Faux et archi-faux nous répond William Friedkin ! Le talent en revanche reste intact. A l'aube de ses 80 printemps, le réalisateur de « L'Exorciste » ou encore « French Connection » nous livre un thriller white trash grinçant, à l'humour extrêmement noir et malsain. Brutal, cynique, décomplexé, déjanté, cette réalisation est assurément à part dans le paysage cinématographique de ces dernières années. Si ça va quand même parfois un peu loin (la scène de la cuisse de poulet par exemple), le scénario s'avère bien ficelé et la réalisation parvient parfaitement à faire ressortir le contexte de crasse sociale et de malaise moral. « Killer Joe » est dans le même temps un film sur la fatalité, sur la rédemption impossible des « losers » de naissance notamment à travers le personnage campé par Emile Hirsch (excellent). Juno Temple livre une prestation exceptionnelle tant ce rôle de gamine-objet paumée au regard tragiquement rêveur était compliqué à endosser. Quant à Matthew McConaughey, on n'avait pas vu personnage si taré et transgressif depuis belles lurettes. Tout « vieux » qu'il est, William Friedkin montre que l'on peut encore faire du cinéma original avec ses tripes.