Un film noir comme on dit, représentatif des États-Unis de la guerre froide, où la population était prête à être terrorisée par tout événement dérangeant. Ici, c’est un « sniper » (titre original que l’on ne traduirait plus aujourd'hui mais habilement traduit par le titre français de l’époque) qui tue des femmes brunes à l’aide d’un fusil de tireur d’élite de l’armée. On ne sait pas grand-chose du tueur (que l’on connaît dès le début, il n’y a pas d’effet de suspense sur l’identité du criminel donc) sinon qu’il a été probablement traumatisé dans son enfance par une mère qui ne lui a rien appris (dixit). La police de San Francisco va se casser les dents pendant quelques jours avant de le retrouver et de l’arrêter… la fin est originale et apporte un éclairage assez subtil sur la personnalité de l’homme. Les questions posées sont tout d‘abord celles qui assaillent toute société prise au dépourvu par un acte incompréhensible à sa logique interne et qu’elle tend à rejeter sur ce qu’on appelle la « folie »… terme commode pour désigner tout ce qui n’est pas conforme. La scène avec les politiciens où le psychiatre tente de leur expliquer les mesures qu’il conviendrait de mettre en place pour éviter de tels actes est significative : la société n’est pas prête à payer pour la prévention (trop chère) et veut seulement une punition rapide. Ensuite, évidemment, on a là un nœud œdipien classique qui n’apporte pas grand-chose au débat vu la concision de l’exposition du cas… Côté technique, le film est bien monté avec des séquences nerveuses qui exposent d’une manière juste les méandres tourmentés de l’esprit du meurtrier. Les images en noir et blanc de San Francisco sont réalistes et esthétiques, le scénario est linéaire mais bien construit dans la tradition hollywoodienne et les acteurs sont bien en place, Adolphe Menjou en tête dans le rôle d’un vieil inspecteur désabusé mais suffisamment expérimenté pour trouver la solution de l’énigme. Quant à la mise en scène d’Edward Dmytrick, elle est sobre mais efficace, notamment dans le rendu successif des meurtres, chacun étant filmé d’une manière plus distanciée que le précédent.
Maqroll
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le 23 déc. 2014

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