"There are jumpers and those who make them jump. You, you jump !"

Après avoir réalisé divers courts et moyens métrages, principalement des documentaires, Ivan I. Tverdovski est passé, avec Classe à part, au format long.


Pour son nouveau projet, l’auteur décrit la corruption gangrénant la Russie sur différentes strates, et cela, via le parcours d’un protagoniste pour le moins atypique.


En effet, Denis souffre d’une maladie le rendant insensible à la douleur. Abandonné, dès son plus jeune âge, au pied d’un établissement spécialisé, le jeune homme apprend à vivre avec cette condition tout en éprouvant les limites de son corps.


Le retour de sa mère va être le début d’une spirale infernale au sein d’un jeune groupe tout aussi fascinant que malfaisant.


Pour narrer cette histoire, l’auteur opte pour un procédé classique : adopter le point de vue d’un nouvel arrivant entraîné dans un engrenage plus ou moins complexe. Cette technique permet d’avoir les mêmes connaissances que la personne que nous suivons et nous facilite ainsi l'immersion de l’univers dépeint. Nous développons, en sus, de l'empathie pour ledit protagoniste, quand bien même certains dénouements sont prédictibles.


De ce fait, pour que cette stratégie fonctionne, il est nécessaire que Denis, et les individus gravitant autour, soit crédible. Sur ce plan, l’auteur crée une galerie de personnages au profil varié. On peut reprocher le fait que les rôles assignés n’évolueront pas, pour autant, chacun d’eux a une personnalité suffisamment dense pour éviter que cela en devienne caricatural.


La mère, et la relation entretenue avec son fils, en est le parfait exemple. Bien que son dénouement devient de plus en plus évident, cela n’en reste pas moins prenant.


La fascination procurée par cette histoire et ses personnages, peut, entre autres, s’expliquer par la tonalité de l’œuvre et sa mise en scène.


En effet, bien que le sujet soit très premier degré, l’auteur insuffle un peu de légèreté lors de certaines scènes. Les procès publics, bien que tragique dans le fond, sont traités comme des instants grotesques permettant ainsi de démontrer que tout n’est que simulacre et que le verdict n’est qu’une formalité actée bien longtemps avant.


De même, les scènes entre le jeune homme et sa génitrice oscillent entre légèreté et instant malsain.


Au niveau de la réalisation, le jeune homme varie les plans selon l’effet recherché : des plans larges pour appréhender l’environnement, serrés pour capter les émotions ou vivre pleinement une situation, ou encore des plans-séquences afin de ressentir les mécanismes vertigineux de la machination décrite.


Ces variations dans le cadre, s’accordant toujours parfaitement à la situation décrite, évitent toute monotonie et permettent donc de maintenir l’attention du public.


Ivan I. Tverdovski réussis donc à nous happer dans ce récit aussi électrisant que déprimant à la plastique parfaite. Il n’est donc pas étonnant que le réalisateur fut récompensé de l'Atlas d'Or, le Grand Prix de la compétition européenne de l'Arras Film Festival.

tzamety
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le 6 mars 2019

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tzamety

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