Que quelqu'un attrape cet oiseau de malheur !

The Raven (ou horriblement mal traduit en français par L'Ombre du mal) est le film typique de l'année 2012 : plutôt divertissant mais horriblement oubliable. Rien de bien surprenant, ce film recycle un concept dont on s'en est déjà ramassé des tombereaux entiers. Un personnage aide la police à piéger un criminel qui s'est inspiré de son travail ou avec qui il entretenait des liens. C'est simple, ouvert et franchement pas détestable, mais qu'a The Raven à proposer de neuf pour éviter de patauger dans le cliché ? Pas grand-chose malheureusement.


Il faut dire que ce film, il n'a attiré que ma curiosité que parce qu'il contient une scène se déroulant pendant un bal masqué durant la période du Romantisme en Amérique, un élément dont je suis particulièrement friand. Mais une autre chose m'a titillé. The Raven a pour personnage principal Edgar Allan Poe (dont le nom restera imprononçable pour moi) qui, faute de ne pas avoir écrit des romans des plus joviaux, doit aider la police à traquer un serial killer qui s'inspire des meurtres de ses oeuvres. Et là, c'est BANCO ! Cette mode de faire vivre des aventures extraordinaires à des personnages historiques (qui sont de loin l'image qu'on se ferait d'un héros d'action) est irrésistible et a déjà donné naissance à des oeuvres hilarantes mais épiques comme l'inattendu Abraham Lincoln Chasseur de vampires. Mais Poe, c'est encore un niveau au-dessus, parce que là on ne parle pas d'un président mais d'un simple poète appréciant un peu trop l'alcool (et encore, avant le visionnage, j'ignorais qu'il était surtout connu pour ses histoires policières). Mais ô grande surprise, le personnage est bien plus dynamique que j'aurais pu le penser. Il ne se contente pas de se rendre sur les scènes de crimes pour balancer 2-3 phrases qui feront avancer l'intrigue, non non non ! Cet Edgar Allan Poe là, il prend le flingue que lui tend Luke Evans et fonce dans l'action. Il fait feu, monte à cheval, explose des murs et des planchers, pourchasse le méchant, etc. Une relecture rafraichissante du personnage qui n'ombrage heureusement pas trop le véritable Poe et son quotidien particulier (leçons de poésie, coups de gueule dans un bar et analyses d'organes), le tout interprété par un John Cusack dynamique et un brin expressif (contrairement à sa performance dans 2012 qui s'est limitée à de la béatitude pendant 2 heures). On n'est toutefois pas très loin d'un étrange mixte en Jack Sparrow et Sherlock Holmes avec des scènes saugrenues dans lesquelles Poe discute avec un raton-laveur dans son appartement (historiquement correct ?) ou inspecte le cadavre d'un chat en vidant une flasque d'alcool.
Mais plus important que tout : le personnage principal a un objectif, un but précis, en l'occurence retrouver sa charmante fiancée, interprétée par une Alice Eve absolument magnifique mais fade dans sa performance de demoiselle en détresse enfermé pendant la moitié du film dans une boîte à chaussures. Par conséquent, le personnage de John Cusack aide la police en ayant une vraie motivation qui l'oblige à continuer. On ne peut malheureusement pas en dire de même pour son partenaire d'écran Luke Evans, ennuyeux à mourrir dans son rôle d'inspecteur de police lisse comme des fesses de nouveau-né. C'est quoi tes motivations Luke ? Trouver le méchant ? C'est tout ? Rien de plus ? Pathétique ! On ne sait même qui tu es Luke. Tout le monde s'en fiche de toi dans ce film Luke.


Outre le personnage principal fort appréciable et une jolie demoiselle à regarder, The Raven n'a vraiment pas grand chose à proposer. Le coup du méchant qui recopie le travail d'un autre personnage est tellement cliché que le film ennuie rapidement. Tout est prévisible, et une intrigue prévisible, ça craint, surtout quand il s'agit d'un thriller où le temps compte.
Les scènes de crimes sont particulièrement drôle car totalement improbables: le méchant prévoit une sortie de secours des plus complexes, fabrique un pendule-hâche pour tuer un seul type (désolé film, mais l'idée a déjà été prise dans Saw 5, et en mieux fait) et habille un cadavre d'homme avec la robe de la fiancée de Poe et le cache dans un mur. Illogique ! C'est d'ailleurs la meilleure transition possible pour parler du méchant dont le plan est... incompréhensible et tordu. Je ne suis franchement pas sûr d'avoir compris ses motivations. Mais ce que je peux en dire, c'est que j'ai vraiment cru lors de la scène finale qu'on allait avoir droit à une suite où le méchant allait recopier les oeuvres d'autres grands écrivains de l'époque (entre autre Jule Vernes). Mais ce bon vieux Luke Evans (dont on s'en bat les couilles, je vous le rappelle) met fin à l'idée d'un second film. Bravo Luke !


Reste à dire que James McTeigue n'a pas une réalisation des plus époustouflantes mais reste néanmoins efficace. Le bougre n'a d'ailleurs pas pu s'empêcher de mettre des gros plans au ralenti sur des balles en numérique et un méchant au costume similaire à celui de V dans V pour Vendetta que McTeigue avait précédemment réalisé.


On n'est définitivement pas sur un chef-d'oeuvre d'enquête comme le monumental Se7ven mais ça se consomme facilement et sans déplaisir. Mais on oublie bien rapidement, comme si le film, à l'image d'un corbeau majestueux, battait des ailes puis disparaissait dans le brouillard sombre et humide, laissant John Cusack crever seul sur un banc... Oups ! Spoiler !

MonsieurNuss
6
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le 5 avr. 2020

Critique lue 767 fois

MonsieurNuss

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