« Je forme une entreprise qui n'eut jamais d'exemple, et dont l'exécution n'aura point d'imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature; et cet homme, ce sera moi. » Avec ce pacte écrit aux lecteurs en 1765, Rousseau définit un nouveau genre littéraire, celui de l'autobiographie. Depuis, une infinité d'artistes a repris ce concept et Alejandro Jodorowski est l'un des derniers en date avec La Danza de la Realidad. Nous narrant son enfance dans son village natal au Chili, le réalisateur transforme la réalité pour mieux l'oublier et créer un conte onirique, où les âmes cinématographiques sensibles devront s'abstenir.

En reprenant l'ordre des Assassins, Nietzsche disait que « rien n'est vrai, tout est permis ». Cette phrase interrogeant la foi et la vérité fait parfaitement écho à l'œuvre du chilien, qui n'hésite aucunement à utiliser le surréalisme pour accoucher de ses souvenirs, craintes et doutes survenus lorsqu'il était enfant. À cause d'une éducation très sévère et d'un exil difficile subi par ses parents, le cinéaste a trouvé dans l'art (la littérature d'abord, puis le cinéma) un moyen de panser ses plaies, à jamais ouvertes dans sa mémoire. La poésie et le fantastique sont alors des armes redoutables pour Jodorowski car elles lui permettent de modifier la réalité à son bon vouloir, mais aussi de mettre un véritable visuel à ses fantasmes les plus fous.

Authentique film de et sur la famille (pas moins de six membres sont crédités au générique), La Danza de la Realidad se contemple tel un rêve que tout le monde ne comprendra pas. Certains même seront déroutés à l'idée d'assister à des chants maternels d'opéra, des hommes dévorant des ânes, ou la Théosophie personnifiée. En jouant constamment avec la vérité, il n'est pas si surprenant de voir ce romancier faire apparaître cette figure philosophique pour trouver des réponses à ses questions existentielles.

La religion, la politique, la vengeance ou le courage sont autant de thèmes évoqués dans cette création que transcendés par le poète chilien. En marge de l'économie cinématographique (il utilise le crowdfunding pour financer son film), Jodorowski prouve qu'il est également unique en son genre en signant une œuvre aussi personnelle que singulière. C'est par ailleurs ce qui fait la force et la faiblesse de La Danza de la Realidad, une contradiction de plus dans un monde qui est tout aussi paradoxal, fait de rêves et de cauchemars...
Hugo_Harnois_Kr
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le 8 févr. 2014

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Hugo Harnois

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