Une comédie flamboyante que ce dernier film signé par le délicieux Lubitsch (La Dame au manteau d‘hermine sera terminé après sa mort par Preminger). Jennifer Jones est toute de grâce et de spontanéité face à un Charles Boyer toujours aussi à l’aise dans le registre du marivaudage subtil. Le scénario est rempli d’intelligence et surtout d’un humour aérien, reposant sur des équivoques à connotation sexuelle (les fameux tuyaux !) contournant habilement le code Hays, comme seul Lubitsch avait le pouvoir de le faire. Véritable testament de son auteur, au même titre que Le ciel peut attendre mais moins solennel et plus léger, Cluny Brown détient toutes les qualités que l’on attribue à la Lubitsch touch : des dialogues brillants, une mise en scène parfaite, une interprétation homogène jusque dans les moindres petits rôles (entre autres le flegmatique C. Aubrey Smith et l’impayable Una O’Connor) et un propos faussement anodin qui recouvre une réflexion profonde sur les rapports entre les hommes et les femmes, abordant la sexualité avec une audace inouïe. Un chef-d’œuvre d’élégance.