Emmet, un employé du bâtiment parfaitement lambda, devient du jour au lendemain le Special, l'élu de la prophétie, qui doit sauver son monde de briques d'une fin imminente.


La réalisation de Phil Lord et Chris Miller est très rythmée et nous en envoie plein la vue à chaque seconde. Le côté 200 à l’heure pourra cependant en fatiguer certains, mais d’un autre côté cela est justifié en fin de film.
Mais surtout, l’animation est très intéressante, dans un style « réaliste » et stop motion. À l’heure où on peut faire absolument tout grâce aux ordinateur, l’équipe s’est attachée ici à reproduire… les imperfections. Les interstices inégaux entre les briques, les peintures qui s’écaillent avec le temps, les petites entailles sur les visages… Ainsi, malgré la débauche visuelle permanente, on a presque l’impression de pouvoir tenir ces legos entre nos mains.


Pour ce qui est de l’histoire, The Lego Movie nous présente une fresque épique, épileptique et déjantée, mais aussi une révolution sociale et une critique de notre société conformiste. Notre culture mainstream très formatée est en particulier retournée contre elle. Un nombre hallucinants de références sont parodiées, le tube « Everything is Awesome » est une mélodie pop entrainante complètement vide de sens, la structure du film elle-même est un détournement d’oeuvres cultes allant du Seigneur des Anneaux à Matrix en passant par Star Wars —sauf que les prophéties sont bidons et le Spécial n’a rien de spécial—. On a droit à une quinzaine de trouvailles inventives par seconde, souvent très drôles et parfois étonnamment profondes.


La dernière partie du film, avec les humains, prend un virage intéressant. Will Ferrel joue un père qui, s’il utilise toujours des legos, a perdu son âme d’enfant. Et le film prend un autre sens. Il est était malgré lui le méchant dans l’histoire en legos à laquelle on assistait, inventée par son fils à l’imagination débridée. Il ne s’agit plus de sauver le monde, mais de « sauver » le père et de le réconcilier avec le fils. Même la réalisation prend un sens en collant à l’univers imaginaire foisonnant du gamin. Le message de fin « tout le monde peut être spécial », peut sembler un peu bâclé et neuneu, mais j’y reviendrai plus tard.


Parce qu’une question se pose légitimement : ce film est-il une pub hypocrite de 2h pour les legos ? Parce qu’après tout, c’est bien le business model de la boite (badum tsss) de nous vendre cher des produits formatés avec un manuel d’instructions à suivre. Ce contre quoi le film s’insurge. Mais personnellement je ferais un parallèle avec les Simpsons, qui ont pris pour habitude de taper durement sur la Fox, qui produit le dessin animé.
Certes, il ne faut pas être naïf, c’est bien une pub, mais cela n’altère en rien les qualités du film. Car c’est là que le message de fin prend tout son sens. On peut se réapproprier des produits standardisés grâce à l’utilisation que l’on en fait. Comme les super-héros, la pop-culture en générale… et bien évidemment, les legos. C’est grâce à cela qu’on peut se différentier les uns des autres, devenir « Spécial », et qu’importe si c’est pour construire des canapés superposés ou des vaisseaux loufoques.


Bref, La Grande Aventure Lego est un film surprenant, régressif et jouissif qui réussit à rendre ce système de briques étonnamment profond. Si vous n’êtes pas épileptique, c’est un immanquable.

Bastral
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le 8 août 2018

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Bastral

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