Ce film est le dernier dans lequel Raoul Walsh dirigeait Errol Flynn, achevant ainsi une collaboration qui a donné quelques véritables joyaux, dont un faisant même partie de mon top 20 personnel de tous les temps, Gentleman Jim. C'est aussi, peut-être, le dernier film où on a encore un flamboyant Errol Flynn à l'affiche, même si l'alcool commençait déjà à vieillir prématurément ses traits. Je ne saurais pas expliquer pourquoi exactement, mais il y a une impression de fin d'Âge d'or personnel pour la star. Il tournera d'autres très bons films après, trouvera quelques autres beaux rôles, mais ça ne sera plus du tout comme avant.


Mais pour en revenir au film lui-même, on a affaire à une double fin plutôt décevante. Certes Errol Flynn est étonnant et tout à fait convaincant dans le contre-emploi d'un affairiste cynique, qui ne s'embarrasse guère de scrupules pour gagner des tonnes de pognon. Certes Ann Sheridan est à la hauteur de son partenaire en femme de caractère ; enfin surtout dans la première moitié, car malheureusement son personnage sera un peu trop sacrifié dans la seconde. Mais voilà, ce qui cloche, c'est le scénario.


L'ensemble se tient plutôt bien jusqu'à ce que le protagoniste fasse son David (d'ailleurs, au passage, la parabole biblique n'est pas utilisée avec une subtilité remarquable, elle est évoquée trop fréquemment donc trop lourdement !). Mais après cela, l'ellipse est un peu trop présente, utilisée au petit bonheur la chance, allant ainsi à l'encontre de la moindre idée de continuité dans la psychologie des personnages (d'accord, il y avait une espèce de mélange amour-haine chez le personnage joué par Sheridan envers celui de Flynn, mais le fait que le premier tombe à la vitesse de la lumière dans le bras du second n'est pas crédible du tout !) et rendant quasi-inexistants certains seconds rôles (par exemple Barton MacLane aurait pu être employé plus efficacement en le faisant apparaître beaucoup plus souvent, lui donnant ainsi une présence plus marquante et plus menaçante en antagoniste !)  ; cela fait aussi que l'inévitable chute du protagoniste, après avoir tâté de la folie des grandeurs des sommets, arrive trop brusquement, occultant la moindre force au récit, qui aurait été là si la dégringolade avait été montrée progressivement.


On ajoutera un happy-end, à base de rédemption, absolument pas convaincant par rapport au reste du film et à la personnalité du personnage principal, ainsi qu'un moralisme lassant, symbolisé par l'ivrogne saoulant (quel jeu de mots !), joué par Thomas Mitchell.


Donc des adieux en demi-teinte de Raoul Walsh à Errol Flynn, de l'Errol Flynn flamboyant à l'Errol Flynn vieillissant.

Plume231
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le 4 nov. 2019

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Plume231

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