N'y allons pas par quatre chemins, c'est son titre original qui m'a donné envie de voir ce film. Aussi, parce qu'il y est question de bolides, univers qui ne me captive pas, mais que Ron avait rendu incroyablement épique dans Rush des années plus tard.


Pour sa première réalisation, Ron Howard nous a concocté une course-poursuite géante, un spectacle en mouvement, typiquement cinématographique. Sur un argument de départ des plus basiques ; un jeune couple effectue un trajet Los Angeles-Las Vegas dans le but de se marier sans le consentement des parents de la fille, déjà promise à un fils de bonne famille, au volant de la Rolls du vieux, « empruntée » pour l'occasion. Les jeunes gens entraînent derrière eux une horde hétéroclite de poursuivants : les parents, le fiancé pleurnichard, et une fois que la presse est mise dans le coup via la radio locale qui fait le lien entre les autos, de ponctuels chasseurs de prime viennent s'ajouter à la course endiablée. Les moteurs ronRONnent, le carburant est brûlé, et quand les tôles sont froissées et les voitures hors d'usage, il suffit d'en piquer une autre, modus operandi qui sera repris tel quel dans le jeu vidéo éponyme.


Le résultat fait penser, en plus fauché – production Corman oblige – à certaines œuvres dites commerciales de Clint Eastwood comme L'épreuve de force ou le diptyque de l'orang-outan, mais aussi au Convoi de Sam Peckinpah, tous réalisés simultanément. Sans le fun ou le sentiment de liberté anarchique qui s'en dégagent. En effet, hormis quelques tampons bien chorégraphiés, l'alternance dantesque (référence à Joe Dante, le monteur du film) entre les plans in et out des habitacles, à grands renforts d'accélérés, créer rapidement une impression de surplace. Et ce mouvement perpétuel peine à générer une quelconque implication ou émotion. Surtout que le film n'est servi ni par sa direction d'acteur des plus caricaturales et outrancières (Seul Ron Howard et Nancy Morgan s'en sortent, et ne disposent que d'une scène, moteur éteint, pour relever le niveau), ni par sa plate photographie signée Gary Graver, chef-opérateur attitré d'Orson Welles, ici visiblement davantage dans sa veine Robert McCallum (son pseudonyme de réalisateur porno) que The Other Side of The Wind. Cela se sent dès le générique de début, en lettres roses et accompagné d'une mélodie guillerette à la flûte traversière (le titre Grand Theft Auto est cependant épargné de cette couleur, et conserve sa crédibilité criminelle). Cette proximité inattendue avec Gorge Profonde n'est somme toute pas fortuite, dans la mesure où se dégage en arrière-plan une frustration sexuelle qui ne demande qu'à se libérer de conventions bourgeoises toujours tenaces, 10 ans après le Summer of Love. Car c'est précisément de celles-ci dont Ron et sa copine cherchent à se libérer tout au long du film. La route servira de substitut à tous les autres...


Tommy Vercetti et le jeune Han Solo sont encore loin, à l'inverse de Clint, j'aime à le répéter, tant nombre de motifs de ses films (les ambiances de Doux, dur et dingue, le car de retraités de Sudden Impact...) se retrouvent étonnamment là-dedans, tout comme les ingrédients les plus farfelus des Dirty Harry et ses déclinaisons seront décalqués par la suite dans la franchise vidéoludique. Mais ceci est une autre histoire, et l'on retiendra du présent film une humble tentative de spectacle cinématographique brut, qui, malgré ses nombreux défauts, est d'une honnêteté louable, à l'image du personnage principal incarné par Ron Howard lui-même, qui préférera se cantonner seulement à ses mises en scène dans la suite de sa carrière, pour des résultats plus convaincants.

GA71
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le 16 déc. 2018

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