Pour ceux qui ont une âme de théâtreux

Le Dindon est un objet curieux en décalage avec ce qu'on a l'habitude de voir en terme de comédie française. En effet, le film est l'adaptation de l'une des célèbres pièces de théâtre de Georges Feydeau, auteur de très nombreux vaudevilles. Connaissant bien ce genre de théâtre ainsi que cette histoire, j'ai été emballé à l'idée de la découvrir sur grand écran et surtout intrigué du souffle contemporain que Jalil Lespert a pu lui apporter. J'ai été surpris par le parti pris de situer l'action dans les années 60, car mis à part le fait que ça nous rappelle les bonnes comédies kitsch avec Louis de Funès, ça dessert plus le propos plutôt que ça ne lui rend service. Nous voilà projeté dans une autre époque sans faire un écho direct avec la nôtre. Il y a juste la représentation des femmes qui fait mouche : elles ont du répondant et plus d'un tour dans leur sac et ne se laissent pas avoir par leur mari infidèles, crétins et égoïstes. Mais pour ça, pas besoin d'être dans les années 60 pour nous le faire comprendre... On est donc diverti, amusé mais pas vraiment convaincu par la nécessité de cette formulation quelque peu saugrenu. Les dialogues, les situations, les jeux d'acteurs sont théâtraux. L'élocution un peu précieuse de Guillaume Gallienne, le jeu très de Funès de Dany Boon ou encore la voix surannée de Camille Lellouche sont atypiques, proches du cabotinage par moment. Mais pour moi, ce qui empêche "Le Dindon" de cramer, ce sont justement ses acteurs qui ont l'air de se donner à coeur joie dans cette machinerie décalée mais tout de même divertissante, surtout pour le théâtreux que je suis. Le rythme des quiproquos et des scènes qui s'enchainent est plutôt efficace même si ça aurait été sympa que le film dérape de son côté conventionnel ! Au lieu de se cantonner au tout public, je pense que Le Dindon aurait gagné en force en se montrant un peu plus cru, voire provocateur !