Le Grand Soir par educharm
Société de consommation et idéal Punk, voici le thème du très attendu (par moi du moins) film de Benoît Delépine et Gustave Kervern. Près de dix ans après la sortie du fantastique Aaltra, les réalisateurs grolandais continuent leur tour d'horizon de la France d'en bas à travers le prisme surréaliste.
Jean-Pierre Bonzini, caricature du Français moyen, employé zélé dans une zone d'activité commerciale, ce nouveau foyer de l'activité humaine ou "il fait chaud l'hiver et frais l'été", broyé par la pression de son emploi et de sa vie familiale rejoins son frère "Not", un nostalgique de l'idéal punk qui se targue d'être "le plus vieux punk à chiens d'Europe". S'en suit une quête de la liberté par delà la solitude et l'indifférence dans le froid décor de préfabriqués et de places de parking. A la fois drôle et tragique, "Le grand soir" dépeint la pénible survivance de l'Idéal dans un monde "au norme, avec des produits aux normes et des gens aux normes". Quel espoir reste-il pour la condition humaine ? La 8-6 ; un dionysiaque concert des Wampas dont les séquences ponctuent le film ; l'abstraction de toute réalité matérielle.
Dramatiquement actuel, porté par un jeu d'acteurs excellent, ce film dépeint la société de consommation sans s'adonner pour autant à un réel engagement social. Le burlesque et l'absurde, la bêtise omniprésente confèrent plutôt à la dérision désintéressée voire au cynisme. Les spectateurs désireux d'émotions que nous sommes tous auraient souhaités un message plus net, une critique plus cinglante. Malgré une idée de départ fort bonne, l'histoire ne décolle jamais vraiment : Force ou faiblesse ? Cette "carence" ne trahit pas un film sur la morosité de nos sociétés, sur l'idéal déçu.
On conclurait en disant que "Le grand soir" est un bon film, serti de scènes hilarantes, de plans de caméras exceptionnels, d'une bande son remarquable.