Cela fait 15 ans que je n'avais pas vu ce film, conseillé à l'époque par un amoureux de Mario Bava.

Cela m'a beaucoup amusée de craquer pour les mêmes instants, à 15 ans de différence : l'introduction, impressionnante, avec ce masque à pointes de fer qui s'avance vers le spectateur avant de s'enfoncer, à coups de maillet énorme, dans un visage aux yeux révulsés, qui pleure alors un sang grisâtre ; une croix qui se brise, faisant retomber des éclats de verre sur un masque démoniaque ; des ruines perdues dans la brume, filmées façon Hammer ; un combat contre l'ombre d'une chauve-souris, sortie d'un tombeau où se dessinent la silhouette pâle de quelques restes humains ; la course de la calèche, fantastique, à l'arrivée copiée par Coppola dans son Dracula ; une caméra qui se faufile à travers des branches tortueuses, donnant au spectateur l'impression d'épier un piège ; les jeux d'ombres expressives sur des visages qui sortent de l'ombre ou de sous-terre, yeux écarquillés par leurs instincts maléfiques ; un visage troué et tordu par le passé, qui offre un baiser cryptique aussi fascinant qu'horrifiant ; les minuscules instants gores (mention spéciale aux yeux qui plopent) ; une femme qui rajeunit, grâce à de subtiles jeux d'ombres ; un château à la décadence poussiéreuse, une crypte rongée par l'humidité et un temps maudit ; une lune qui dévoile la silhouette baroque d'une tourelle ; l'ombre portée d'une croix sur un décolleté profond ; du romantisme un peu outré (ce piano !) quand l'histoire d'amour se met en place ; des portes qui se referment par magie, des fonds de cheminée qui dévoilent des passages secrets, des balcons italiens en Moldavie, des armures qui s'écroulent, une cape qui vole alors qu'une damoiselle en détresse cherche du secours, des mains qui se tordent, des monstres repoussés par un vent de mysticisme, une foule folklorique en colère, un bûcher qui s'élève haut pour enfouir dans ses flammes un cri entre colère et horreur.

Tout cela est fort caricatural, la narration piétine un peu et certains dialogues sont absolument niaiseux, mais la plupart des plans sont si bien trouvés (de très beaux travellings), d'un romantisme si agréablement macabre, où lumières et contrastes façonnent les ombres pour en tirer un Mal à la séduction suggestive, que je suis prête à fermer les yeux sur l'univers manichéen et cette vision cliché de la sorcière et du vampire...
LongJaneSilver
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le 27 mars 2014

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LongJaneSilver

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