Succès planétaire éclipsant même E.T., Jurassic Park allait nécessairement voir une suite. Spielberg a même pensé utiliser la crème-à-raser de Nedry comme MacGuffin pour en lancer l'intrigue... Mais Michael Crichton ne l'a pas entendu de cette oreille : il a concocté une toute nouvelle ile à explorer, et a ressuscité Ian Malcolm, mort dans le premier livre mais rescapé du film.
Est-ce qu'il n'a pas aimé la prestation de Sam Neill ? Ou par pur snobisme ? Nul ne le sait. Toujours est-il que, tout sympathique qu'il est, son livre est bancal et jamais aussi inventif que le premier.
Mais Steven y voit l'occasion de parler de l'éternelle lutte idéologique qui oppose les cueilleurs et les chasseurs. En effet les deux équipes aux procédés diamétralement opposés ( étudier à distance vs dinos à emporter ) vont devoir coexister pour, une fois encore, sortir vivant de ce Monde Perdu.
Ça ne fait plus aucun doute, Spielberg est le maître incontesté du morceau de bravoure à rallonge, et en empile une bonne dose pour le plaisir de nos mirettes. De la chasse aux dinosaures par les humains à la chasse aux humains par les raptors, en passant par la chasse au mobile-home par le couple de T-Rex, il offre la preuve éclatante de son talent... De ce qu'est SON cinéma même.
Le Monde Perdu a donc tout dans sa besace pour être l'évènement de l'année, à la fois une digne suite mais aussi sait aussi s'affranchir de son prédécesseur. J'aime beaucoup par exemple que l'épopée ne soit pas une simple ballade dans l'parc. Il y a des morts, du sang, du brutal !
Alors qu'est-ce qui cloche, me demanderez-vous ?
Déjà la photo. Kaminski est loin de retrouver l'art de Dean Cundey quand il s'agit de filmer les bestioles animatroniques. A bien des reprises, on voit des monstres de latex et de mousse de polyuréthane en lieu et place des dinosaures. Et c'est terriblement douloureux de se voir montrer le making of en même temps que le film ! Bon an mal an, il s'en sort, et certaines scènes, même trop longues ( je pense à Peter Stormare dévoré trois fois par les compys... ) fonctionnent tout à fait.
Mais il y a plus grave : le scénario. C'est une surprise pour personne, les séries B ne s'embarrassent pas souvent d'un scénario, mais là y'a un laissé-aller indigne d'enfants de 4 ans... Les fameux morceaux de bravoure cités plus haut ne s'enchainent absolument pas naturellement, tous les liens sont artificiels et forcés, brisant fréquemment l'illusion du 7e Art. Le pire de tous : quand Malcolm et sa petite famille sont cernés par les raptors et que d'un coup Vince Vaughn revient, annonce l'arrivée d'un hélico et emmène tout le monde voir le T-Rex à San Diego en moins de trois minutes...
D'ailleurs cette scène de San Diego, très sympathique isolément, prouve sans détour que le scénariste David Koepp n'en a plus rien à foutre de son travail : on le voit se faire bouffer tout cru !