It´s not personal, just business

Si Le Parrain a une telle aura aujourd'hui, considéré comme un des plus grandes sagas du cinéma et comme film majeur du nouvel Hollywood (selon moi la meilleure période du cinéma américain), c'est parce qu'il est bien plus qu'un film de gangsters, mais bel et bien une tragédie contemporaine, les principaux éléments du genre y sont présent, que ce soit le dénouement dramatique, la fatalité du destin, les conflits intérieurs ou bien encore la trahison.
C'est également une œuvre qui se veut à la fois une parabole sur le pouvoir et le poids de l'héritage, un drame familial, une critique de l'Amérique capitaliste, mais avant tout l'histoire de la chute du fils prodigue.
La grande prouesse de Coppola est qu'il a réussi à transformer une œuvre de commande en chef-d'œuvre intemporel.
L'intrigue fait preuve d'une grande richesse narrative, et met en place une profusion de lieux et de personnages, enrichissant ainsi l'histoire du film, histoire qui se centre sur les destins croisés du père Vito Corleone, chef mafieux et figure centrale de la famille, et de son fils préféré Michael, qui se tient à l'écart car il ne veut pas suivre la même voie que ses frères, mais un évènement va boulverser leurs vies et les obliger à se remettre en question, amenant ainsi à une évolution des rôles.
Le film fait preuve d'un degré de perfection cinématographique rarement atteint, que ce soit concernant les prestations d'acteurs inoubliables (Brando,Pacino,Caan), la réalisation magistrale de Coppola, la reconstitution d'époque bluffante de vérité, la musique marquante de Nino Rota, et le travail remarquable de Gordon Willis sur la photographie.
Concernant la mise en scène, Coppola (en plus d'être un grand directeur d'acteurs) fait preuve d'un classicisme salvateur qui permet au film de très bien vieillir.
Le Parrain a un statut à part, car il est hors normes, plus qu'un film sur la Maffia, c'est un film sur l'Amérique, plus que l'histoire d'une famille, c'est l'histoire d'un homme prisonnier d'un destin auquel il ne peut échapper.
C'est avant tout l'histoire de Michael, la tragédie d'un homme qui sacrifie sa morale et ses idéaux pour protéger sa famille, et qui, en prenant la succession de son père, devint ce qu'il ne voulut jamais être.