Le Roi Lion
7.8
Le Roi Lion

Long-métrage d'animation de Roger Allers et Rob Minkoff (1994)

Toi aussi, apprends à stigmatiser les hyènes et à vivre comme un hippie !

J'ignore jusqu'à quel point chacun d'entre nous a été biberonné par Disney durant son enfance. A titre personnel, je garde une certaine frustration car si ma mémoire m'indique que j'ai vu une palanquée de long-métrages d'animation de la firme, je n'ai que trop peu de souvenirs de ces films, à quelques exceptions prêtes. La cassette vidéo des Aristochats a longtemps traîné sur une étagère par exemple. Alice au Pays des Merveilles m'a marqué car ma mère me rappelait régulièrement que c'était mon non-anniversaire tout en m'implorant d'avoir confiance, inspirée par une autre aventure se passant dans la jungle. Puis la voix du serpent n'était pas sans m'évoquer celle d'un gaulois à moustache. Ce n'est que bien plus tard que je compris que cette voix fut omniprésente dans le catalogue Disney (et je leur en remercie).


J'avais des souvenirs plus concrets de deux films sortis durant cette décennie qui m'a vu naître : Aladdin et le Roi Lion. Pas de scène particulièrement marquante ou de chanson sortant du lot à ce moment.. ou presque. En fait, l'univers du second nommé m'a accompagné durant mon enfance puisque Disney était également présent en matière de séries. Si j'étais trop jeune pour suivre la Bande à Picsou ou Super Baloo, je revoyais avec grand plaisir une mangouste et un phacochère dans leurs pérégrinations sans pouvoir me ôter de la tête la chanson du générique. En un sens, le Roi Lion ne m'avait donc jamais quitté.



Hyène de vie



Le cinéma ne m'a attiré que bien plus tard, en tant que jeune adulte et ce n'est donc qu'à ce moment que j'ai décidé de rattraper mon retard cinématographique. L'animation m'ayant toujours botté, il me fallait replonger dans mes plus jeunes années et m'assurer que ces classiques le restaient. J'ai aujourd'hui près d'un quart de siècle, soit un peu plus que ce film et je confirme, cela reste un classique qui n'a pas du tout vieilli.


Ayant un œil plus critique (mais toujours bienveillant), je ne peux faire l'impasse sur les quelques défauts. On peut penser au manichéisme cher à Disney et qui semble entrer en contradiction avec les bons messages que l'on veut faire passer. Parce que bon, les hyènes elles sont méchantes et c'est tout ? Pourquoi elles forcément ? Lors des premières minutes on voit les autres animaux mais en quoi ils contribuent à l'équilibre de la vie cher à Mufasa au final ? Montrez nous leur contribution au lieu de stigmatiser ces pauvres hyènes. Merde quoi, elles ont juste faim !


Aussi, Simba est touché par ce que j’appellerais le syndrome Harry Potter : être plus intéressant grâce à ce que l'on vit plus que par ce que l'on est. Du coup si nous restons en empathie avec lui, l'attachement aurait pu être plus fort. D'autant que la tourmente par laquelle il passe connaît un dénouement un peu bancal. Je veux dire, il doit affronter sa (fausse) culpabilité mais une fois que c'est annoncé on prend moins d'une minute avant que Scar avoue la vérité. Faudrait savoir ! Je demande pas des discours Nolaniens mais quitte à ce que vous présentiez un dilemme plus adulte, allez au bout des choses. Pis bon, vous qui êtes si bons pour nous offrir des personnages féminins marquants, on ne peut pas dire que vous ayez réussi avec Nala. Rien de catastrophique, juste totalement oubliable au milieu de toutes ces trognes.



Scarément géant !



Mais tout ceci est bien accessoire. Outre tout ce que Disney sait faire de bien et ce qu'il fait très bien ici, ce qui impressionne avec le Roi Lion, encore aujourd'hui, c'est cette sensation d'ampleur. Ils ne la jouent pas petits bras dans ce film. La musique, les plans, certaines scènes, tout est fait pour nous faire comprendre que c'est immense, aussi bien dans le fond que la forme. La scène d'introduction en soi est peut-être la meilleure du film, avec la Terre des Lions dans toute sa splendeur, les personnages présentés sans le moindre mot, le tout sous ce thème garanti par un Hans Zimmer qui n'était pas encore devenu un fétichiste du cuivre. Et comme si ça ne suffisait pas, on voit cette souris écrasée par la patte immense de notre bad guy (enfin, lion) adoré. Si après ça, on n'est pas investi...


Je parlais de l'enrobage parce que oui, ce film est encore magnifique aujourd'hui. On tire le maximum de la 2D et on se sert de l'outil informatique intelligemment. De plus, c'était une technologie encore novatrice donc pour s'assurer que cela passe bien à l'écran, on s'est donné à fond et ça se voit. Cela reste impressionnant même pour l’œil habitué à ces SFX. Mais oui, vous savez, ces trois lettres s'envolant dans une poussière d'étoiles alors que Simba déprime. Ah non c'est vrai, c'était une volonté des réalisateurs de cacher une nouvelle allusion tordue. C'est bon les gars, on vous a compris, c'était marqué "SEX", le godemiché de la Petite Sirène ne vous suffisait pas on dirait !


Ensuite qui dit Disney dit musiques. Si on les voit arriver aussi vite que le troupeau de gnous, elles ont le mérite d'être bien espacées, variées et surtout mémorables. La plus entêtante restant Hakuna Matata, prouvant qu'on n'avait pas besoin d'une chanson brisant la glace pour s'inscrire dans notre cerveau et ne plus en ressortir. Cela étant, toutes les chansons sont de qualité et il y en a pour tous les goûts entre la chanson d'introduction, la chanson d'amour, la chanson du vilain, la chanson comique ou la chanson "Je m'accroche à ton subconscient tel un facehugger à ton visage et tu ne pourras plus me retirer". Comme souvent, la mélodie du méchant sort un peu plus du lot car tout ce qui l'entoure respire la bad-asserie.


Puis que serait Disney sans ses personnages ? Je suis certes mitigé sur Simba et dubitatif sur Nala mais tous les autres qui ont droit à un minimum d'exposition sont géniaux. On aimerait tellement que le film dure plus longtemps afin qu'on ait droit à plus de scènes avec eux. Aspect bien entendu renforcé par notre version française. Loin de moi l'idée de remettre en question le talent de noms tels que Jeremy Irons ou James Earl Jones mais nos acteurs de doublage sont rarement à prendre en défaut quand il s'agit de donner vie à un dessin animé. Jean Reno est classe en Mufasa, Jean Piat habite Scar, Med Hondo s'amuse en Rafiki, Michel Prud'homme est hilarant en Zazu, Michel Elias et Jean-Philippe Puymartin sont d'inoubliables Timon et Pumbaa et je serais damné si Maïk Darah ne réussissait pas à me donner un sourire, même si c'est pour incarner une hyène. Dans tout cela c'est presque surprenant qu'Emmanuel Curtil sorte moins du lot quand on sait que le bonhomme peut parfaitement sublimer un doublage que ce soit en animation (choisissez votre camp entre le Prince d'Egypte, Anastasia ou l'Age de Glace 3) ou en prises de vues réelles (qui regarde un film de Jim Carrey en VO ? Ca existe ?). Mais pour le coup, peut-être limité par son personnage, il est bon sans plus.


Enfin je parlais d'ampleur, aussi bien pour l'emballage que pour l'intérieur et je le maintiens. J'ai beau garder mes réserves pour l'exécution du message mais on voit Disney sortir un poil de sa zone de confort et nous confronter à un tourment plus adulte, quitte à faire du Bambi en plus gros quant à la mort d'un parent. Un peu couillu en comparaison de productions plus inoffensives. Pis voir le vilain atteindre son objectif à mi-parcours, ce n'est pas fréquent dans leur catalogue. Certes, je lis ici et là qu'on a pompé sur divers mediums, y compris Hamlet, mais en voilà une bonne idée ! De toute façon l'important n'est pas nécessairement d'innover à chaque fois mais de tirer le meilleur parti d'une idée. Allez me dire que Disney a échoué dans cette entreprise quand on sait que la Reine des Neiges a battu le record du Roi Lion en réactualisant idéalement ses clichés et que Zootopie prouve qu'on peut faire passer un message avec intelligence et efficacité pour parler à toutes les générations, en dépit d'un message très loin d'être original.



Hakuna Montonton



Ce qui est amusant c'est que je ne pense pas qu'il s'agisse du meilleur Disney proprement dit et que si j'étais honnête, je mettrais plutôt 8 que 9. Ce qui joue comme j'ai dit, plus que l'aspect nostalgique (qui concerne surtout ce mini âge d'or des années 90), c'est cette ampleur. Ironique quand on sait qu'on misait davantage sur Pocahontas ! Mais s'il n'est pas parfait, le Roi Lion est un des long-métrages qui marque, dont on se souvient, que ce soit pour son histoire, son animation, ses personnages, ses musiques ou tout cela à la fois. Le type de films que tu ne te repasses peut-être pas toutes les semaines mais où tu prends le même plaisir à chaque visionnage, quelque soit ton âge. C'est aussi ça la magie de Disney non ?

Créée

le 12 sept. 2016

Critique lue 620 fois

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Masta21

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