Dénicher un film d'horreur dont le scénario ne sera pas traité comme une excuse à la mise en scène relève du travail d'archiviste... Malheureusement, The Hallow ne dérogera pas à ce qui ressemble à une règle.
Le pitch initial laissait présager des esprits comme matérialisation animale de la forêt. Il n'en sera rien. La distance que le réalisateur installe entre sa caméra centrée sur les personnages et les lieux ne permet à aucun moment de s'immerger dans cet enfer végétal. Tout au mieux et une fois de plus, la forêt n'est que prétexte à une série de scènes d'horreur vues et revues, et dont les nombreuses influences assumées donnent un résultat final aussi foutraque qu'angoissant.


The Hallow se distingue clairement en 2 phases. La première, durant une très longue heure, pose les bases d'un scénario d'une platitude insondable, fait de lieux communs et de fadaises éculées (le voisin qui vient menacer sans jamais dire clairement pourquoi). Une vraiment longue heure durant laquelle le réalisateur avait tout le temps de donner une âme à ces lieux qui font le titre de son film. Las ! Corin Hardy ne semble pas avoir mis souvent les pieds dans une forêt, tant celle-ci restera, du début à la fin, un simple décor, prétexte à l'accumulation de monstres en tous genres et de scènes d'horreur empruntées à de nombreux classiques et qui feront la force du film (on y reviendra).
Sans âme ni subjectivité, nous nous contenterons de suivre Adam, pseudo-expert en forêts dont la sensibilité au monde sylvestre témoigne d'une profonde ignorance du réalisateur pour les lieux qu'il filme. Car n'importe quel sylviculteur aurait montré davantage de connexions aux arbres que ce scientifique-ci, passant plus de temps penché au-dessus d'un microscope qu'à la reconnaissance des lieux. D'ailleurs le seul lien qui sera fait entre le travail d'Adam et la forêt est une courte scène durant laquelle le "docteur des forêts" fait des croix sur les arbres à abattre. Il ne fait que son travail ! Nous répétera plusieurs fois le scénario, incapable de créer un véritable lien entre humains et forêt. Très vite, le spectateur découvrira la source du mal qui règne en ces lieux, évacuant par la même occasion tout mystère. L'impénétrabilité légendaire des forêts, balayée d'un revers de script, éteint toutes les interrogations du spectateur dont la seule profondeur qu'il atteindra est l'ennui.


Reste la dernière demie-heure, remplie de références à des œuvres telles que The Thing (la scène du chien), divers film d'horreur, de La Mouche à Evil Dead, pour la fusion entre l'homme et le Mal, et surtout Lovecraft pour ces créatures oubliées, mythes anciens réveillés par la présence de l'Homme moderne, et l'apparition lourde et inutile d'une version celte du Nécronomicon.
Cette dernière demie-heure, foutraque au premier abord pour le nombre appuyé de ces références, est particulièrement réussie à l'heure où les films d'horreur font dans la surenchère gore (Hostel et autres Saw). The Hallow flirte avec le délire psychotique et bascule plus dans la folie (Lovecraft là encore) et les profondeurs de la noirceur.


Pour profiter donc pleinement de ce film, il faudra savoir faire abstraction de toute originalité au profit d'une efficacité assumée et libérée. Incohérent (des passages jour/nuit improbables), The Hallow n'offre même pas l'attrait d'une expérience nocturne angoissante. Un halo (sic) de lumière, toujours présent pour aider les personnages à se diriger, crée une distance infranchissable entre la réalité et la fiction. Ici, nous ne serons jamais vraiment dans le réel, et la forêt, sous cet éclairage, fera figure de décor de studio. Preuve encore que Corin Hardy n'a probablement pas souvent marché dans une forêt la nuit, sans quoi il aurait su que l'on ne peut s'y diriger avec autant de facilité. Les personnages, portés par des acteurs convaincants, trouvent toujours les maisons et les grottes secrètes dans ce qui devrait être l'obscurité la plus complète. Quel talent ! Et quel gâchis.

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le 10 mars 2016

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Fortynine Days

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