Le film se déroule en 1684, au début de l'ère de Jokyo (qui signifie « Prendre justice »). Le crucifiement au Japon remonte au XIIème siècle et il était encore pratiqué dans la deuxième partie du XIXème siècle. L'action se passe dans un premier temps dans une vaste demeure labyrinthique, où la profondeur du champ fait cohabiter plusieurs actions simultanées. C'est très beau. Les déplacements des personnages dans cet espace sont souvent d'une grande élégance, tournant parfois aux poursuites burlesques . Jeux de paravents, de cloisons, d'escaliers. Les plans qui mettent en scène deux personnages sont filmés avec une grande variété de postures, parfois en contre-champ. Le raffinement des chants tranche avec la dureté des relations humaines. L'importance de l'honneur et de la honte redoutée sont les principaux moteurs de cette histoire de lutte de pouvoirs, où les ambitions et l'hypocrisie des uns se règlent sur le sort des autres. La musique de fosse, percussive, martèle les actions. Une scène prémonitoire et brève montre des amants adultères crucifiés, peut-être déjà morts. La loi et la soumission sont les moteurs de cette société très hiérarchisée. La révélation de l'amour agit comme un antidote. Course enlacée et éperdue à travers la nature, elle ne sera malheureusement qu'une parenthèse avant la funeste conclusion, le retour à la loi. Mais c'est en se serrant les mains que les amants iront au supplice, le visage extatique.

abel79
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le 9 juil. 2021

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