I'm about to loose control and I think I like it

Une vague de fraicheur arrive dans nos salles obscures, un rayon de soleil livré par Pedro Almodovar, un divertissement sans retenu : Les Amants Passagers. 19ème film du cinéaste, Almodovar se confrontait au problème de chaque réalisateur : comment faire mieux que son ancien film, mieux que La Piel que Habito, chef d'œuvre dramatique ? Là où Steven Spieberg et Tim Burton ne font que rabâcher leurs anciennes gloires, Pedro Almodovar choisit lui de changer d'univers, revenir dans une comédie où des steward gays mettent de la mescaline dans les verres des passagers de la classe affaire face à un possible crash de l'avion où ils sont. Dans Les Amants Passagers tout drame est écarté, place au rire !

C'est l'histoire d'un tueur à gage, trois gays, une vierge et deux pilotes bi-sexuels dans un avion. Ce film aux allures d'une bonne blague part d'une volonté de revenir à la comédie, genre qu'Almodovar avait laissé pendant vingt ans, de faire un film à l'image de sa bande sonore : disco à souhait. Son irréalité provient du fait que tout problème apparaissant à l'horizon est directement envoyé en l'air : face à un possible crash de l'avion les steward drogue les passagers et reprennent I'm so excited pour les divertir, face à un possible suicide d'une femme sur le célèbre "Pont des suicides" la caméra se focalise sur un téléphone tombant miraculeusement dans un panier de vélo juste en-dessous. Si le film perd de son rythme vers le milieu du film, c'est parce qu'il sort de l'avion et film le sol, beaucoup moins intéressant. Alors qu'à l'intérieur, la croisière s'amuse.
Pénélope Cruz et Antonio Banderas, les fidèles acteurs d'Almodovar, viennent ici donner le relais aux nouveaux acteurs, annonçant une volonté de sortir du système Hollywoodiens en choisissant des acteurs presque inconnus au bataillon. Changer d'air, ça se fait aussi par les acteurs. Dans À la merveille, n'importe quel acteur auraient pu jouer les rôles. Mais dans Les Amants Passagers, chaque acteur convient parfaitement à son personnage, de la vierge voyante au trio de steward, point culminant du film. Tout ceci est bien entendu livré par la mise en scène calculée d'un réalisateur devenu maitre, réalisant un tour de force en filmant la quasi totalité du film dans un simple avion, sans jamais se laisser limiter par l'espace. Des plans précis et attrayants, presque du jamais vu dans un film comique ou généralement on bâcle la réalisation, laissant reposer le film sur les épaules des acteurs vedettes (comme Boule et Bill, par exemple, chef d'œuvre d'horreur visuelle).

Mais n'allez pas croire que le film se résume entièrement à ses blagues, car à travers les lignes nous pouvons aussi y lire une critique, celle d'une société bloquée dans des débats sur le mariage homosexuel, où il n'y a que dans un avion que des homosexuels peuvent enfin se livrer à leurs vraies natures. Et de ce fait, libérer tous les autres passagers.
La Piel que Habito reste le monstre de Pedro Almodovar. La force de Les Amants Passagers et de ne pas vouloir le détrôner (pourquoi se battre contre soi-même ?), mais plutôt de changer d'air, apporter un peu de fraicheur dans le paysage cinématographique sombre et destructeur dans lequel nous vivons. Prenant des airs de Woody Allen, qui avait tenté de filmer une scène d'avion dans To Rome with love, Pedro Almodovar décide de s'envoler hors de tout nos problèmes et nous offrir un film sans prise de tête, l'essence même du cinéma : un divertissement. Les Amants Passagers et la meilleure façon de s'envoyer en l'air, dans tous les sens du terme.

Pierrick Boully
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le 4 avr. 2013

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