Les Sept Corbeaux
Les Sept Corbeaux

Long-métrage d'animation de Ferdinand Diehl (1937)

Sombre comme un corbeau, mélancolique comme une poupée et merveilleux comme un conte

Les Sept Corbeaux voit le jour quelques semaines avant Blanche-Neige et les Sept Nains.
Il s'agit du deuxième long-métrage d'animation allemand, après Les Aventures du Prince Ahmed, réalisé par Lotte Reiniger en 1926, et le seul à avoir vu le jour sous le régime nazi.
Il est également le troisième long-métrage à utiliser cette technique d'animation consistant à assembler image par image des photographies de marionnettes, après Le Nouveau Gulliver, film de 1935, par le Russe Aleksandr Ptushko, et Le Roman de Renard, film français réalisé en 1937 par Ladislas Starewitch. De 1929 à 1970, ce sont les frères Ferdinand et Hermann Diehl qui ont possédé le plus important studio de marionnettes allemand, ce qui leur a permis de sortir ce film d'animation poétique.


Les Sept Corbeaux (en allemand : Die Sieben Raben) est une adaptation du conte éponyme rédigé en 1812 par les frères Grimm, qui furent aussi la source de Walt Disney pour la réalisation de son premier long-métrage. Il est relativement fidèle au conte, bien que certains éléments dans le déroulement de l'intrigue aient été modifiés.


Si le film est projeté pour la première fois aux Etats-Unis en avril 1953, il n'est par contre jamais distribué ni projeté en France. Je n'ai pu le trouver qu'en version originale, c'est-à-dire en noir et blanc et en allemand, mais mes maigres connaissances m'ont permis de comprendre l'essentiel du film. Je pense que la langue ne devrait pas constituer une barrière vous empêchant de profiter de ce chef d'oeuvre cinématographique, c'est pourquoi j'ai souhaité rédiger le compte-rendu détaillé ci-dessous.


L'intrigue est contée par un fou qui s'adresse à un groupe de villageois, en train de pique-niquer dans une forêt.
Les Sept Corbeaux raconte l'histoire d'une jeune fille qui rencontre par hasard deux dames. Celles-ci ne semblent pas avoir la langue dans leur poche et commencent à dire à la jeune fille qu'elle est responsable du malheur arrivé à ses frères. La jeune fille, qui ignorait l'existence de ces derniers, rentre ensuite chez elle et demande des explications à sa mère. Celle-ci lui raconte alors les événements du jour où ses sept frères sont partis chercher de l'eau dans le puits pour son baptême alors qu'elle venait de naître. Ses frères se seraient disputé et auraient laissé tombé la cruche dans le puits, ce qui rendit fou de rage leur père qui formula le souhait de les transformer en corbeaux. Ce vœu insouciant fut exaucé sur-le-champ et les frères se transformèrent en corbeaux avant de s'envoler.


A la nuit tombée, la demoiselle va se coucher, emplie de culpabilité. Son père rentre du travail et apprend que le secret n'en est plus un. Furieux, il craint que sa petite protégée cherche à retrouver ses frères.
En effet, le lendemain, la jeune fille s'enfuit. Elle demande de l'aide aux villageois et tous lui répondent qu'il n'y a pas la moindre chance qu'elle les retrouve, et qu'elle ne trouvera que des ours et des loups sur son chemin. Elle finit par se retrouver dans une forêt peuplée d'animaux, et elle s'assoupit au creux d'un arbre.
C'est là qu'apparaît une fée, qui lui explique le moyen de rompre la malédiction : la jeune fille doit coudre sept robes et jurer de ne plus prononcer le moindre mot pendant sept ans. La fée s'enfuit, et un jeune prince qui passait par là découvre la jeune fille. Il tente de la faire parler, lui demande qui elle est et ce qu'elle fait toute seule. Il la complimente ensuite sur sa beauté et lui demande de l'épouser. Mais la jeune fille, qui s'était juré de ne plus ouvrir la bouche, ne réagit pas à ses propos. Elle se fait donc emmener par le prince, qui l'habille et l'amène jusqu'au château sur son cheval pour célébrer leur mariage.


Au bout de sept ans, la jeune fille et le prince finissent par avoir deux enfants. Mais un jour, ces derniers se transforment à leur tour en corbeaux et s'envolent par la fenêtre. Les rares personnes présentes crient au scandale : la jeune fille est une sorcière ! Elle est emmenée de force pour subir un interrogatoire, mais elle ne peut toujours pas répondre. A contre-cœur, le prince finit par signer son arrêt de mort sur le bûcher.
C'est là que la fée réapparaît dans le cachot où se trouve enfermée la princesse. Elle lui dit qu'elle est parvenue à rompre la malédiction, car elle a su terminer de coudre les sept robes demandées. Ses frères ne seront donc bientôt plus des corbeaux.
Le jour du bûcher arrive. La jeune fille se trouve aux portes de la mort, lorsqu'un de ses frères apparaît, suivi du prince, maintenant persuadé de l'innocence de son épouse. Elle est ensuite libérée et elle retrouve enfin ses frères et ses deux enfants.


Les Sept Corbeaux ne connut jamais un succès foudroyant. On reprocha au film d'être trop sombre, trop philosophique et mélancolique pour des enfants. Il n'est pas étonnant qu'il ne soit jamais parvenu jusqu'à nous si même les enfants allemands n'ont pas été conquis.
Pour ma part, je trouve que c'est justement cet aspect sombre et philosophique qui rend ce long-métrage si poétique. Les Sept Corbeaux raconte l'histoire d'une jeune fille prête à se sacrifier pour sauver ses frères, parce qu'elle se sent responsable de leur malheur. Nous sommes loin d'un scénario dans lequel une femme est prête à tuer l'autre pour être la plus jolie...


Les marionnettes s'expriment et se déplacent comme des poupées de porcelaine. Leur expression est figée, ce qui leur confère un air triste et mélancolique. Il n'y a que leurs bouches qui sont flexibles, mais elles n'expriment jamais aucun sourire, uniquement des mots susurrés dans un allemand à la qualité sonore vieillissante.
Les décors du film sont tellement étonnamment réalistes, que je me suis demandé si les marionnettes n'avaient pas été construites grandeur nature. Les arbres, les feuilles, de même que les différents animaux... Tout est réalisé avec finesse et précision.
Je retiendrai aussi la scène où le fou joue de la guitare, ainsi que toutes les allées et venues de la fée, particulièrement fluides. Certains mouvement de caméra sont aussi étonnants pour l'époque.


Notons également la musique enchanteresse qui accompagne Les Sept Corbeaux et nous transporte encore davantage dans cet univers merveilleux.


En quelques mots, ce film d'animation vaut vraiment le détour. Certes, le ton emprunté est bien loin de celui de Blanche-Neige et les Sept Nains ou du Roman de Renard, tous deux sortis la même année, mais il n'en est pas moins merveilleux.

Lilymilou
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le 21 janv. 2020

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