La filmographie de Sion Sono est foisonnante, variée et profondément inégale. On y trouve des films complètement barges, certes, mais pas seulement.


Coldfish et Himizu peuvent par exemple être vus par quiconque cherchait simplement à voir un chouette thriller ou un drame réussi.


Why don't you play in hell est quant à lui très méta, et son propos tourne presque exclusivement autour du cinéma. C'était mon préféré et le premier film que j'avais vu de ce mec.
On peut rencontrer également dans sa filmographie de la fable, de la comédie, des trucs plus ou moins réussis, certains bien foirés même (Suicide Club pour ne citer qu'un des plus fréquentables), les films précédemment cités faisant partie des réussites.


Love Exposure c'est encore autre chose. Déjà, ça dure 4h. Faut prendre le temps, surtout en lisant le synopsis et en connaissant le réalisateur, on peut se demander si ça ne sera pas un peu long.


Je me suis longtemps demandé moi-même si ça ne serait pas un peu long. Alors j'ai repoussé le moment de son visionnage, plusieurs fois, lorsque je souhaitais tenter un des films de Sono. Après visionnage, et bien je considère que en ce qui me concerne, il n'est pas trop long. Il est dense, généreux, un peu foutraque mais vu le nombre de thématiques abordées, il ne s'agit pas d'étirer bêtement un pitch de départ pourtant déjà bien barré.


En gros, le film raconte l'histoire d'un jeune homme pur, un peu trop, un naïf inoffensif qui, pour être considéré par son prêtre de père qui l'ignore et déteste lorsqu'il n'a rien à s'entendre confesser, se met à commettre des péchés. Pour continuer sur cette voie, le jeune homme rejoint un club de "pervers professionnels" qui s'entraînent à réaliser des cascades de rue afin de pouvoir photographier sous les jupes des filles.


Difficile d'imaginer qu'un postulat pareil puisse mener à autre chose qu'une bouffonnerie absurde et, pourquoi pas, très cool à regarder. Alors oui, ça y mène en partie, mais les 4h font que l'histoire va finalement bien plus loin et joue sur beaucoup plus de registres que ce qu'on pourrait attendre.


On se marre grassement et on passe par un peu toutes les émotions, des plus sombres aux plus légères. La mise en scène est excellente, blindée d'idées qui fonctionnent, inventive et libre. J'ai rarement vu un film réussir à être aussi bon sur des registres absurdes, tragiques ou épiques alternativement, ou même parfois simultanément. Etre aussi con et aussi intelligent à la fois, drôle et triste, etc.


Je crois pas que Sono sortira un jour un meilleur film que celui-ci, qui est pour moi son chef-d'œuvre. C'est le seul qui parvient à avoir assez de tenue pour vraiment exploser son cadre, y'a un truc qui prend et qui fait de lui un grand film tout court.


Je continuerai de regarder sa filmographie de temps en temps, mais quand je vois la bande-annonce de Prisoners of the Ghostland, ça fait un peu mal au cœur. On voit le côté barré, un peu bancal, le potache et l'absurde mais un peu moins la grâce et la dimension bouleversante que peut avoir son cinéma dans Love Exposure.


C'est un peu le paradoxe de ce film pour moi, avec sa durée dingue je m'attendais à un film en roue libre totale mais il est le plus maîtrisé, ambitieux et finalement accessible de tous.

EverettMcGill
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le 9 oct. 2021

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Everett McGill

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