Pour faire simple, ce film parle d'un éleveur de chevaux qui s'est fait sévèrement arnaquer par un noble, et qui compte bien réclamer justice. Et l'éleveur en question, Michael Kohlhaas, est incarné par la gueule burinée de Mads Mikkelsen. Rapidement, je me suis mis à rêver d'un scénario de western italien à la sauce "système féodal inégalitaire". Et sur le papier, c'est bien ce que j'ai eu ; l'histoire est bonne et je ne doute pas que le roman dont elle est tirée soit excellent. Malheureusement, nous avons affaire à un réalisateur issu de la Femis et qui, par conséquent, se voit à tort comme un artiste.

Déjà, le film est tout public, donc oubliez le médiéval crade ou la vengeance sanglante. Michael Kohlhaas arrive à parler de révolte paysanne en limitant l'action au hors-champ ou, à la rigueur, à une scène filmée avec suffisamment de distance pour devenir illisible. Le seul passage gore consiste en une jument qui met bas. Ce parti-pris peut se défendre, ou du moins il le pourrait s'il avait autre chose à proposer en contrepartie ; or, ce long-métrage n'est jamais plus qu'un film d'action sans action : les dialogues sont mornes, le scénario avance horriblement lentement et met plus d'une demi-heure à démarrer - une demi-heure de souffrance durant laquelle j'ai envisagé de quitter la salle, ce qui ne m'était jamais arrivé auparavant - il se dégage un sentiment d'ennui voire même de frustration.

Seuls bons points du film : des acteurs à gueule - Mads Mikkelsen, Denis Lavant,... - et une histoire délocalisée dans les Cévennes qui suppose des décors naturels de toute beauté. Dommage que le directeur de la photographie ne soit pas à la hauteur. Surtout, les quelques enjeux religieux risquent d'être difficilement compréhensibles pour les non-Protestants, largement moins nombreux en France qu'en Allemagne, où se déroule le roman d'origine ; Denis Lavant incarne ni plus ni moins que Martin Luther, sauf que son nom n'apparait jamais...

Avec ses deux heures interminables, Michael Kohlhaas est donc avant tout un film chiant, à trop se vouloir esthétisant et contemplatif sans jamais y parvenir. Son scénario vaut largement le coup, mais la réalisation ne fait que le desservir ; il serait donc plutôt recommandé de lire le bouquin.

La même histoire entre les mains d'un Sergio Corbucci, vous aviez un chef d’œuvre.

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le 21 août 2013

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Ninesisters

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