Mission: Impossible - Rogue Nation par lhomme-grenouille

Il faut tout de même bien reconnaître ce mérite à Tom Cruise, c’est qu’il sait bien s’entourer, sentant qui fait évoluer le cinéma d’Hollywood dans le bon sens. De Palma au départ, John Woo à la fin des années 90, J.J. Abrams après l’éclosion de l’âge d’or des séries, Brad Bird après l’âge d’or de Pixar, et maintenant Christopher McQuarrie, le gars qui s’était dernièrement fort bien illustré au travers de son bon « Jack Reacher ». Et là, pour le coup, je dois bien avouer que son choix m’a plutôt parlé puisque j’ai davantage accroché à cet épisode qu’à ses derniers prédécesseurs. Et la raison est simple : l’action. Je trouve que McQuarrie est un très bon cinéaste d’action, qui sait la filmer à l’ancienne, sans trop de surcharge, notamment sonore (des courses poursuites sans musique : mais quelle évidence ! Pourquoi est-il presque le seul à s’y risquer ?) et là, dans ce « Rogue Nation », je trouve qu’on en a pour son argent. Les scènes d’action sont diversifiées, spectaculaires (l’introduction suffit à poser l’efficacité du bonhomme je trouve) et restent maîtrisées de bout en bout. Après, je vais peut-être faire mon rabat-joie, mais j’avoue que malgré tout, j’ai quand même du mal à décoller totalement pour une raison toute con : je n’accroche jamais à l’enjeu. A dire vrai, je ne vois jamais vraiment d’enjeu dans les films « Mission : Impossible ». Pour le coup, on nous ressort un énième méchant standard qui veut… euh bah être méchant il me semble...


(Parce qu'à dire vrai on ne sait pas trop ce qui le motive le gars, à part jouer les pales copies de "Skyfall".)


Et puis face à ce méchant; on oppose des agents gentils qui s'en sortiront toujours parce qu'ils ont des super-mégas gadgets à la "James Bond".Alors oui, je sais, c'est un peu le principe de cette saga : comme pour "James Bond", on se doute que les gars vont toujours s'en sortir, sinon il n'y a pas vraiment de film... Certes. Mais par contre ce qui serait cool, c'est qu'au moins, on puisse nous aussi, en tant que spectateurs, partager un instant la situation des protagonistes. Parce que pour le coup, comme dans les tous précédents opus, je me retrouve un peu passif face aux situations évoquées. Dès qu'une situation semble inextricable, le scénario nous sort un gadget farfelu - la plupart du temps inconnu au bataillon - un peu de la même manière qu'Harry Potter nous invente un sort quand ça l'arrange. Je trouve la méthode facile, voire même pas très productive, car il n'est pas rare que ces mêmes objets forts utiles pour le scénario à un moment donné soient par la suite totalement oubliés dans des situations où ils pourraient pourtant résoudre bien des problèmes. Et c'est cela un peu le souci que je rencontre avec ce film là. Je ne viens pas forcément pour réfléchir et pourtant, on a voulu me donner l'illusion qu'on me racontait quelque-chose, qu'il y avait de la malice dans les actes et stratégies des protagonistes, alors qu'en fait, ce n'est pas du tout le cas, bien au contraire. Voilà qu'on focalise régulièrement mon intention sur un aspect du film qui est loupé alors que ce n'était même pas ce que je lui demandais. Avouons que c'est un peu con. Et venant d'un mec comme Christopher McQuarrie, un gars qui a quand-même été capable d'écrire un jour dans sa vie le merveilleux scénario de « Usual Suspects », je trouve ça bien triste. Honnêtement, le film aurait nettement gagné en allure avec un scénario moins fouillis, mais plus audacieux dans son propos (oui parce que bon, "la gentille Amérique en lutte contre les méchants terroristes", c'est un peu éculé comme enjeu, surtout quand on veille bien à déconnecter la question de l'actualité en prenant des terroristes anglais, blonds aux yeux bleus, sans aucune motivation politique particulière.) Mais non. Au lieu d'épuration et d'audace, McQuarrie leur a préféré la même stratégie cache-misère que dernièrement dans "Edge of Tomorrow" ; il enchaîne très vite les informations et les raisonnements afin qu'on ne voit pas les incohérences et les lacunes de l'écriture. Et là, vraiment dommage, parce que pour le coup, ça fait donne un peu l'impression d'un travail fait à moitié, d'une belle occasion de manquée. Après, certains diraient qu'une moitié du job est au moins faite, et bien faite. Pour être honnête, je serais d'accord avec eux. De nos jours, un blockbuster filmé proprement, ça se fait déjà rare, alors savourons ça. Un MI qui se regarde, moi je ne crache pas dessus.

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le 24 sept. 2017

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