Comprendre. Pourquoi ? Comment ? Après Hedi, un vent de liberté, sorti en 2016, le réalisateur Mohamed Ben Attia récidive dans le portrait intimiste avec Mon Cher Enfant, présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. Un sujet fort et universel traité avec pudeur et retenue.


Parler du terrorisme et de la radicalisation dans le cinéma d'aujourd'hui demeure toujours une tâche délicate afin d'éviter les écueils faciles du pathos et du sentimentalisme. Le cinéaste tunisien Mohamed Ben Attia écarte, avec ce second film, tous les pièges pour livrer une tragédie intimiste touchante par la simplicité de son dispositif et la sincérité de son discours. Il nous interroge également sur le manichéisme avec lequel on a souvent l'habitude de réduire le traitement du phénomène terroriste.


S'occuper de son fils malade, l'attendre en pleine nuit dans la voiture pendant qu'il s'amuse avec ses amis, lui acheter ses céréales préférées, s'inquiéter pour son avenir. Mon Cher Enfant débute avec ces simples gestes d'amour, comme chronique d'un quotidien. Et c'est dans ce minimalisme, son approche sobre, cette apparente vérité du réel que le film trouve l'une de ses plus belles réussites.


"Le plus difficile était de ne pas tomber dans un manichéisme prévisible. De garder subtilité et délicatesse. Je voulais éviter la facilité et d'aller directement dans une condamnation même si elle est tout à fait légitime. Je voulais dépasser ce premier degré de la haine, de la colère". Un pari réussi pour le réalisateur Tunisien qui est également scénariste de son film.


Jamais explicative, toujours dans l'incarnation et dans la mesure, la mise en scène de Mohamed Ben Attia séduit réellement par son approche intime et cohérente. On suit constamment ce père, de dos et toujours en mouvement, comme pour matérialiser cette marche en avant comme lutte quotidienne pour la vérité. Mohamed Dhrif incarne magnifiquement ce personnage avec force, pudeur et introspection.


Voir les frères Dardenne producteurs, n'a semble-t-il rien d'un hasard quand on voit la pate du cinéaste Tunisien sensiblement proche de celle des cinéastes belges. Du cinéma fin, juste, incarné, qui confirme le talent d'un des rares portraitiste du cinéma tunisien contemporain.

JoRod
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le 23 nov. 2018

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