Quand on est con, on est con. C’est pas moi qui le dis, c’est Brassens. Quand Michael Badaboom Bay laisse son équipe pyrotechnique en vacances c’est assez exceptionnel pour attiser ma curiosité. Et pour cause, les films du réalisateur californien sont tellement soutenus par un déluge d’explosions et une ribambelle de moneyshots, que le voir se lancer dans un projet pareil soulève l’interrogation, voire un petit rire moqueur. C’est pourquoi je vais essayer de vous expliquer dans ce papier comment l’attente que l’on porte à une œuvre conditionne énormément notre ressenti. Car aussi curieux que ça puisse paraître, j’ai bien aimé ce film.
Oui je sais j’annonce déjà la couleur, et vous me toisez hautement du regard. Non mais je l’avoue, le mec commence pas trop mal en nous parlant de Cloud Atlas, puis juste après il ose vanter les mérites du dernier Michael Bay. Crédibilité Zéro. Et en même temps, quand on s’attarde sur ce film dopé à la piquouse 90s, il est très difficile de ne pas lui trouver un capital sympathie important. Explications.
No Pain No Gain nous raconte l’histoire vraie de kidnapping, d’extorsion et de meurtre fomentés par trois bodybuilders dans le Miami de 1995. Une histoire dure, violente, tournée vers les méchants de l’histoire, qui ne peut évidemment pas emporter l’adhésion du public, à ce détail près : Ces méchants, ces bodybuilders, sont cons comme la lune et cette histoire dramatique est tellement hallucinante de débilité qu’elle en devient surprenamment comique.
C’est déjà intéressant en soit de voir Bay retourner à Miami en 1995 quand on sait que c’est en ce lieu et en cette année précise qu’il a commencé sa carrière de réal’ sur Bad Boys. Le rapprochement avec Bad Boys peut également se faire sur le plan financier, puisqu’avec un budget « d’à peine » 26 millions de dollars, No Pain No Gain rejoint Bad Boys dans le classement des films les moins coûteux de son réalisateur. Tant qu’on est là à parler pognon, il faut également noter que ni Michael Bay, ni Mark Wahlberg, ni Dwayne Johnson n’ont touché de salaire pour ce tournage (En échange d’un pourcentage élevé sur les recettes, tout de même).
NPNG m’a rappelé ce très bon film méconnu qu’est Alpha Dog de Nick Cassavetes, autre histoire vraie de kidnapping et d’extorsion. Mais là où Alpha Dog parlait avec sérieux de jeunes qui perdent totalement pied avec la réalité et les conséquences de leurs actes, le film de Michael Bay dépeint une autre forme d’insouciance dans le crime puisque ses protagonistes ont un QI proche d’une huître dessalée en plein air. Et ce qui pourrait sombrer très rapidement dans le mauvais goût, devient étonnement une force car Michael Bay ose quelque chose d’hallucinant : il traite son sujet sérieusement. Et quand je parle de Bay, j’implique également le casting, Wahlberg & Johnson en tête.

Comprenons-nous, il n’y a rien de plus casse-gueule qu’une histoire vraie tirée d’un article de journal. La mise en scène de Bay est kitch au possible, le scénario invraisemblable, et le propos quasiment inexistant. Malgré la production design « so 90s » à base de vieux logos Nike, de Dodge rouge et de string flashy, Michael Bay ne cesse d’alourdir l’univers visuel du film à grands coups de titrages, de caméras haute-fréquence pour des slowmotions totalement gratos, sans parler de son sempiternel plan rotatif qui ne fait kiffer que lui. Comme si il était dans l’incapacité totale à faire un film sans artifice, qu’ils soient pyrotechniques ou visuels. Surtout qu’il avait avec lui un casting totalement à fond ! Dwayne The Rock Johnson campe un débile profondément gentil, ersatz bourré aux stéroïdes d’Averell Dalton totalement hallucinant de drôlerie. Et que dire de la prestation de Mark Wahlberg… Marky Mark m’a tout simplement épaté en crétin qui s’ignore ! Il ne joue pas tout simplement le con, il joue un con qui pense être un cerveau. Et c’est ce qui marche à mort dans ce film, le fait que tout le monde joue le jeu à fond, sans jamais chercher à nous faire de gros clins d’œil. Ce premier degré dans le traitement apporte tout le décalage comique du film. Ce spectacle hallucinant et halluciné qui captive complètement un spectateur qui a du mal à croire que tout ceci s’est réellement passé.
Et je comprends finalement pourquoi Michael Bay avait à ce point à cœur de réaliser ce film. Bay est conscient de son image de réal décérébré pour paquets de lessive, et il joue souvent d’une autodérision qui le rend à mon sens très sympathique. Il fait du blockbuster explosif, c’est le meilleur vrp de l’armée américaine à travers le monde, mais il m’est profondément sympathique. Et ce film est finalement taillé pour lui, car il nous montre une bande de cons comme on en voit rarement, mais qui arrive néanmoins à passer au travers de bien des obstacles tendus par ceux supposés plus intelligents. Et c’est vraiment bien tourné, car on arrive à s’attacher à des criminels, et à se moquer des représentants de la justice. Ce n’est pourtant pas une apologie de la violence, au contraire, et c’est pour tout ça que j’ai sincèrement aimé ce film. Il me semblait bête et méchant, je l’ai trouvé drôle et attachant.
Si vous ne savez pas quoi faire ce week-end avec vos amis, je vous conseille sincèrement ce film. Ce n’est pas un grand film bien sûr, mais c’est un film à voir en groupe, avec le regard halluciné, la main dans un gobelet de pop-corn, comme dans un bon trip sous LSD. Entre deux Transformers dopés aux CGI, ce film mineur dans la filmo de Bay s’avère être une pastille franchement agréable à déguster entre amis. Laissez-vous tenter !
Anfalmyr
6
Écrit par

Créée

le 28 sept. 2013

Critique lue 240 fois

1 j'aime

Anfalmyr

Écrit par

Critique lue 240 fois

1

D'autres avis sur No Pain No Gain

No Pain No Gain
Gand-Alf
6

Pumping Iron.

Vulgaire, beauf, clinquant, sexiste et parfaitement crétin, voici ce qui caractérise le cinéma de Michael Bay, archétype du bon gros ricain sûr de lui, le genre à rouler en 4x4 cheveux aux vents,...

le 7 sept. 2014

53 j'aime

3

No Pain No Gain
Truman-
7

Du Michael Bay sans Michael Bay ça donne No Pain No Gain

Michael Bay réalise ici un film qui sort bien de ses habitudes, en effet pas question de fusillades a gogo, d'explosions a tout va et de super cascades de fou saupoudré d'effet spéciaux hallucinant,...

le 12 août 2013

51 j'aime

3

No Pain No Gain
real_folk_blues
6

Bay Harbour Butchers

Bon alors, faites des photos, des captures d’écran, sauvegardez dans le cloud, entourez la date dans votre agenda, envoyez un mail à BFMTV ; j’ai mis la moyenne à un film de Michael Benjamin Bay, né...

le 3 sept. 2014

50 j'aime

20

Du même critique

Kaamelott
Anfalmyr
10

Alexandre Astier est un menteur

Si vous aimez les histoires de braquage, celle-ci est pas mal. C'est l'histoire d'un lyonnais, musicien, acteur, metteur en scène, scénariste... Le pendant Geek d'Audiard si jpuis me permettre.. Ce...

le 12 janv. 2011

45 j'aime

1

RoboCop
Anfalmyr
5

Le Membre Fantôme

Rarement un Remake n’aura déchaîné à ce point les passions avant même sa première diffusion. Ce film, visiblement personne ne voulait le voir, au point tel que la majorité de la promotion orchestrée...

le 7 févr. 2014

37 j'aime

1

Forces spéciales
Anfalmyr
6

Critique de Forces spéciales par Anfalmyr

Le jour où j'ai appris qu'un film sur les forces spéciales françaises contemporaines était en chantier, j'étais content. Je me suis dit "ah enfin on va parler des héros de l'ombre, on arrive enfin...

le 15 nov. 2011

17 j'aime

2