Synopsis : En 1838, Thomas Hutter, commis d’agent immobilier, quitte sa jeune femme Ellen pour le château du comte Orlok dans les Carpates. Là-bas, Hutter découvre que le comte est en fait Nosferatu le vampire et est victime des morsures répétées du monstre. Celui-ci quitte son château dans un cercueil rempli de terre et, après un voyage en voilier au cours duquel il décime l'équipage terrorisé, va prendre livraison de sa nouvelle demeure, située face à celle de Hutter et Ellen…

Retour en Allemagne, en plein essor de l'expressionnisme où Murnau décide d'adapter Dracula (tout en changeons les noms car il n'avait pas les droits). Voilà comment est né le premier film de vampire de l'histoire, celui qui sera à la base de toutes les autres et qui propulsera le cinéma allemand (avec Fritz Lang) en dehors des strates européennes.

Le choix de réalisation a poussé Murnau à repenser l'expressionnisme. On peut effectivement (re)voir des similitudes avec le caligarisme, notamment dans la psyché des personnages et leurs costumes/maquillages qui traduit des émotions particulièrement fortes. Mais l'astuce de Murnau a été de sortir des studios pour tourner en décor naturel. Ce choix s'avère efficace car il nous rend misérable dans le décor et joue sur des valeurs de plans pour appuyer la peur de la nature (souvent en parallèle avec le personnage de Nosferatu).

Pour la technique, Murnau privilégie les plans fixes, temporise son récit et donne du sens lorsqu'il utilise des mouvements caméras (peu utilisées). Il cherche également un véritable sens artistique à ses cadres : des grandes portes gothiques, qui rentrent totalement en adéquation avec l'expressionnisme. Murnau accentue particulièrement ses lumières pour donner du contraste mais surtout pour jouer sur des jeux d'ombres avec Nosferatu, le grandissant par l'impact lumineuse et lui donnant un aspect beaucoup plus effrayant (à l'époque, ce film était classé dans les films d'épouvante). Ses personnages revêtent les thèmes principaux du mouvement : folie, mort, dédoublement de personnalité, la fascination du monstre, le destin, etc. Je vous invite à lire les critiques respectives de "Docteur Mabuse, le joueur" et "le cabinet du docteur Caligari".

Les cartons ont, cette fois encore, un rôle jouer. Ils se s'agit plus que des dialogues mais ce sont des récits manuscrits provenant d'auteurs diégétique. On nous raconte une histoire via ces écrits (journaux, carnets de bords, journaux intimes, etc.). C'est une nouvelle façon de raconter et de structurer le récit. Pour les effets spéciaux, Murnau privilégié la simplicité et n'a recourt que lorsque c'est nécessaire aux effets (souvent basiques). Ca donne un charme de sobriété au film et le rend intemporel. Ces effets simplistes donne une esthétique fantastique (la traversé des murs, les portes s'ouvrant seules, etc.) L'ouverture de l'iris est presque systématique et donne une sensation du mal qui se propage tout en donnant un regard extra-diégétique. Concernant le montage, on a des champs/contrechamps intéressants entre les protagonistes pour les lier (alors qu'ils ne sont pas dans la même spatialité).

Nosferatu est bien plus qu'un simple film. Et Murnau s'illustre comme grand cinéaste par bien des façons. La première serait une référence à la psychanalyse freudienne où Hutter jouerait le ça et Nosferatu le surmoi. Ainsi, on pourrait lier ces deux personnages tant sur le plan psychologique que sur l'apparence (ils sont souvent opposés).

De plus, Murnau va jouer sur deux mouvements, l'expressionnisme (déjà évoqué) et le romantisme. Pour ce dernier, on utilise beaucoup la nature et les animaux, qui sont des symboles et traduisent énormément d'éléments du film (la hyène, animal exotique, mange les morts à l'instar de Nosferatu). Comme déjà dit, la nature est immense comparé à l'être humain et envahit presque toujours tout le cadre. Autre aspect, l'amour impossible défini entre Ellan et Hutter ; le voyage et le sacrifice également peuvent apporter du romantisme.

Nosferatu restera une figure emblématique du cinéma muet et un vrai chef d'oeuvre intemporel. Murnau s'ouvrira donc au monde entier et proposera d'autres films tout aussi intéressants.

HALLUciné
9
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le 28 nov. 2017

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