Se présentant en deux parties, la première abordant «l'archéologie» du ciel (au sens figuré) la seconde celle de la terre (au sens propre donc), Nostalgie de la Lumière aborde avec poésie le thème du temps, de la mémoire et de la mort de manière émouvante et sincère en évitant l'écueil du pathos.


Quel point commun ont les astronomes et les archéologues? En plus d'être scientifiques, d'explorer chacun la «matière» (le ciel et la terre respectivement), ils ont le même objet d'étude: le temps, et plus particulièrement le passé – pour les premiers le Temps Absolu, pour les seconds le temps subjectif, c'est-à-dire notre passé de Terrien. Voilà le lien que les intervenants du documentaire établissent et qui donne une cohérence aux deux parties (car, outre l'espace qu'ils partagent – le désert d'Atacama, quelque part au Chili – et qui confère une unité de lieu , on n'aurait jamais compris le rapport entre les uns et les autres).


A partir de cela, le narrateur nous mène dans un voyage immobile ponctué de fascinantes photos des galaxies, d'images (comme figure de style) d'une grande poésie sur les étoiles, d'explications techniques magnifiées par le verbe. Puis il donne la parole aux autres scientifiques qui manient eux aussi avec grand art leur langue pour pouvoir transmettre le charme de leur savoir et de leur travail.


Puis, le récit touchant qui suit de ces personnes ayant perdu un proche et voulant à tout perdre faire perdurer leur mémoire reste en adéquation avec le thème principal et propose une variation supplémentaire. Néanmoins, leur témoignage devient répétitif et leur obsession à vouloir retrouver leurs morts ralentit la diégèse. Voilà certainement le défaut du documentaire. Aussi, même si Guzman évite de trop filmer les larmes, la folie pathétique de celle qui a perdu le fil du présent, qui refuse obstinément de le vivre tant qu'elle n'aura pas retrouvé le passé, ne s'accorde guère au lyrisme de la première partie et fait perdre de sa beauté au documentaire.


Malgré tout, Nostalgie de la lumière nous conduit parmi un univers insoupçonné plein de magie avec une grande élégance et sagesse, et il serait dommage de ne pas se laisser porter.

Marlon_B
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le 24 janv. 2017

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Marlon_B

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