Il existe des films qui vous fascinent dès l’instant où vous les regardez pour la première fois. Orange mécanique en fait partie. J’ai immédiatement été subjugué par l’atmosphère du film, ses décors, ses couleurs. C’est aujourd’hui un de mes films préférés, que je revois toujours avec plaisir. Et si vous ne le connaissez pas encore, je vais rapidement vous expliquer pourquoi Orange mécanique est un film qu’il faut voir.


La plupart des gens vous diront que le film est étrange. Et c’est vrai ! Il est difficile d’affirmer le contraire : Orange mécanique n’est pas un long-métrage classique, son schéma n’est pas non plus habituel. Et c’est cela qui en fait un objet cinématographique unique. L’histoire, d’abord, est originale. Elle se déroule dans un avenir dont on ne sait pas s’il est lointain ou pas, même si la technologie ne semble pas plus avancée qu’à l’époque à laquelle le film a été réalisé. Un gang de jeunes hommes (très jeunes, car encore à l’école) ère la nuit à la recherche de personnes à violenter, ou à violer. C’est ce qu’ils recherchent : l’ultraviolence ! Et pour se donner du cœur, ils arpentent des bars, mais pas n’importe lesquels : des bars qui servent du lait agrémenté de drogues. Ce gang n’est pas le seul, et une guerre existe entre les différents groupes, si ce n’est au sein des groupes eux-mêmes.


Le postulat de départ est donc tout sauf grand-public. Il écarte même toute une partie des spectateurs qui auraient voulu voir le film. Car Stanley Kubrick ne s’interdit rien : des scènes de lynchages et des scènes de viols qui sont, il faut l’avouer, parfois difficile à regarder. Il faut savoir qu’en France, le film est interdit aux moins de 16 ans. En Angleterre, le film a été retiré de toute distribution à la demande de Stanley Kubrick, à cause de faits-divers inspirés par son film. Il a fallu attendre le décès du réalisateur pour pouvoir relancer la distribution d’Orange mécanique au Royaume-Uni. La mise au point est faîte : ce film n’est pas pour tous les publics. Mais il n’y a pas que de la violence dans ce film, il y a aussi une histoire très intelligente, une réalisation impeccable et un message. Car tout ceci ne serait rien si aucun message n’était véhiculé. Cependant, il est difficile de révéler le sens de ce message sans spoiler, je ferai donc une partie spoiler pour ne pas gâcher le film à ceux qui ne l’ont pas vu.


Côté réalisation, Stanley Kubrick a créé des plans sublimes, à commencer par celui qui ouvre le film, un plan séquence où les personnages sont étrangement fixes, et où Alex DeLarge, le personnage principal, regarde le spectateur droit dans les yeux, comme un avertissement. J’en profite pour parler rapidement des acteurs : Malcolm McDowell a trouvé ici le rôle de sa vie (qui lui a parfois fermé des portes), tant il excelle dans la peau de ce jeune homme habité par la violence et le sexe. Il apparaît dans presque tous les plans du film, il est l’image même du film. On ne peut pas penser à Orange mécanique sans voir immédiatement le visage de l’acteur. Autour de lui, les autres acteurs sont bons, même si certains sont très caricaturaux (voir le professeur de mathématiques, au comportement étrange, presque aussi malsain que son élève). On notera tout de même le gardien de prison, que je trouve personnellement hilarant, tant son personnage est psychorigide.


Mais revenons à la mise en scène : tous les plans marquent le spectateur, grâce à des décors uniques, du Korova MilkBar à la chambre d’Alex, en passant par la prison. La musique joue également un rôle important pour apporter une cohérence. Ainsi, le scénario, les images et la musique s’accordent parfaitement pour donner au film ce ton étrange, cette atmosphère qui provoque un certain malaise chez le public, mais également une certaine fascination pour cet univers. Le tout accompagné de passage du grand Ludwig Van Beethoven.


Je vais désormais parler de la morale du film.


Car ce film a une morale très claire : il n’est pas utile de punir et flageller à de trop nombreuses reprises une personne pour ses actes, sans quoi elle ne pourrait devenir bonne. En effet, après avoir été arrêté, emprisonné plusieurs années, Alex subit un traitement pour être « guérit » du mal qui l’habite. Ce traitement est éprouvant et, même s’il est désormais inoffensif, le héros en ressort physiquement affaibli. Pourtant, Alex est victime du destin qui lui fait rencontrer plusieurs de ses anciennes victimes, ainsi que ses anciens « drougies », ceux qu’il dirigeait. Il en arrive alors à se jeter par une fenêtre et être ainsi hospitalisé, dans un état grave. Cet état est d’autant plus grave qu’il est clair, à la fin du film, que les effets du traitement se sont dissipés avec le choc de sa chute. Ces trop nombreuses punitions l’ont donc retransformé en monstre.


Enfin, il est également indispensable de parler du vocabulaire unique utilisé par les protagonistes du film, et créé par l’auteur du roman éponyme. Ce langage apporte une authenticité à ce qu’on voit, comme si nous assistions réellement au futur de notre société.


Orange mécanique est un film dérangeant, marquant et formidablement bien réalisé. Il fait partie de ces œuvres qui sont intemporelles, même si leur époque est bien visible à l‘image. Je conseille donc totalement le film ET le roman (dans cet ordre, car le film permettra de vous familiariser avec le vocabulaire du roman, difficile à lire si on ne le connait pas).

EtienneC_NEMA
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le 29 déc. 2016

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