Une critique pour mettre en évidence le fait que c'est une grossière erreur de s'arrêter à la dimension trash-nihilisto-violente du film. Alors, certes, c'est grâce à ça qu'il a autant fait parler de lui : un film d'une violence incomparable pour l'époque, avec l'esthétique de Kubrick, c'est vendeur. Nous conviendrons malgré tout qu'il s'agit simplement d'une accroche et que le véritable intérêt est ailleurs.

Je vais citer Wikipédia pour appuyer mon propos :

"C'est d'ailleurs parce qu'il craignait que des jeunes trop influençables y voient un panégyrique de la violence que Kubrick a accepté de retirer le film des salles britanniques.

Ce sont sans doute les paroles de l'aumônier qui résument au mieux le sens du film : « Quand un Homme cesse de choisir, il cesse d'être un Homme ». Kubrick entendait démontrer que la société ne prône pas le bien, mais force l'individu à se conformer extérieurement au bien.[...]Le film, montrant une société cynique et des pouvoirs publics maniant la dernière démagogie, critique un ordre social où le bien, la morale, ont fait place à un simple utilitarisme policier et technocratique."

Donc selon moi ce film n'est pas là pour dire "les jeunes partent en couille de nos jours", "voici la violence à laquelle on s'expose si on laisse notre société dériver" ou autres thèses de ce genre, au contraire il dénonce les travers totalitaires qui menacent toute société tentant d'imposer l'ordre public par des moyens mécaniques et déshumanisés. C'est une dystopie qui met en garde en ces termes : "Toute forme de société qui semble scientifiquement parfaite flirte dangereusement avec le fascisme." Lorsqu'on étudie la question sous un angle "behavioriste", il apparait que le seul moyen de pacifier totalement la société est d'aller contre la nature humaine, de l'effacer. On peut rapprocher ça de la vision d'Asimov dans I, Robot : "Le seul moyen de préserver l'humanité est d'entraver totalement sa liberté pour qu'elle cesse de s'autodétruire". Ou comment le plus grand humanisme se transforme en fascisme.

On pourrait penser que c'était une préoccupation beaucoup plus dans l'air du temps à l'époque de la sortie du film, mais il faut y voir aussi la dénonciation d'un système dans lequel l'homme n'est pas encouragé à s'épanouir et à vivre réellement libre, mais à se conformer à un système, à rentrer dans une case.

Après on est pas forcé d'adhérer à ces thèses, mais il faut reconnaître qu'elles sont démontrées d'une façon magistrale dans ce film.

Dans cette optique l'ultra-violence d'Alex n'est là que pour faire contrepoids, pour bien marquer les esprits en montrant que malgré ses actes atroces du début du film, on finit tout de même par avoir pitié de lui.
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le 26 avr. 2011

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Julien ******

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