Ce n'est pas que par pur choix esthétique que le film d'animation "Parvana : Une enfance en Afghanistan" alterne autant entre contes et réalité, tant il fait ainsi écho à un pays ayant perdu depuis longtemps le plaisir d'en écouter, et préférant désormais rêver d'un lointain temps de croissance et de plaisir. Une jeune fille, nommée Parvana, use alors de ses histoires et contes pour tenter de fuir la réalité froide et implacable des événements qui gangrènent Kaboul, sous le joug islamique.


Sa condition de femme lui interdit, bien au-delà de simples petits plaisir, de se promener comme d'aller chercher des éléments vitaux pour sa famille, mais est appuyée par son tendre père, professeur et vétéran de guerre. Malheureusement, un jour, il est emmené de force dans une prison, loin de Kaboul et de sa famille, et l'amène dans l'impossibilité de survivre. Parvana a alors une idée : se travestir en garçon pour voir s'ouvrir à nouveaux les portes qui lui ont été fermées depuis longtemps, et faire vivre sa famille.


C'est alors via cette astuce que l'on se rend compte de la terrible ironie qui pèse sur les épaules de l'Afghanistan, qui est de vivre selon des interdits non seulement liberticides, mais aussi insensés. Avec une esthétique toute en arabesque, réalité et histoires se confondent pour offrir un portrait aux multiples facettes d'un pays dévasté sur tout les plans, en proie aux guerres civiles et aux brusques changements de mentalités, dont la logique supplante toute notions et compassion humaine.


La lutte que mène ici Parvana pour retrouver son père est aussi la lutte de Kaboul, ancienne ville charnière de la Route de la Soie, chargée d'histoire aujourd'hui relèguées au rang de champ de bataille, où les ruines du passé tentent péniblement de rappeler aux habitants leur existence. En mettant l'accent sur les origines historiques de l'Afghanistan, sur les anciens contes racontés au coin du feu, et sur la condition des femmes, ce film est bien plus qu'un objet culturel d'intérêt public. C'est aussi une perle visuelle, avec des messages développés avec efficacité et imagination, au cœur d'un pays dont la dite imagination semble s'étioler au fil des âges et des changements perpétuels de régime.

Le-Maitre-Archiviste
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le 13 août 2021

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