Peau d'âne par Eric31

« Je voulais avoir d'un côté le sujet enfantin, merveilleux, qui plairait aux gosses et la vision adulte d'un récit complètement pervers devant lequel le public se mettra ou non des œillères selon son degré de puritanisme. Le scénario est truffé de pièges. C'est l'histoire d'une libération. Au début du voyage, il y a les fantasmes, puis le passage dans l'autre monde provoque une série de déblocages avec la scène du rêve, puis celle de l'essayage de l'anneau... » — dixit Jacques Demy a propos de son Peau d’âne , 1971, dans le magazine de cinéma Image et Son.
Peau d’âne est tout d'abord un conte populaire, dont la version la plus célèbre est celle de Charles Perrault, parue en 1694, puis rattachée aux Contes de ma mère l'Oye en 1697... dont les thèmes centraux du récit seront appeler plus tard par la psychanalyse le « complexe d'Électre »...
Mais c'est aussi la troisieme adaptation cinématographique réalisé par Jacques Demy qui reprend l'intrigue traditionnelle du conte : une princesse (jouée par une Catherine Deneuve... aussi superficielle qu'une Princesse qui est le double de sa mère de Reine) forcée d'épouser son père (joué par un Jean Marais aussi Royaliste qu'un Roi Bleu (couleur qui évoque le sang de la nobilité qui régnait dans les temps féodaux) fuit son royaume en se dissimulant sous une peau d'âne une idée de sa tante la Fée des Lilas (jouée par la sublime Delphine Seyrig aussi Féérique qu'une Fée)... Suscitant l'hostilité par son déguisement, elle parvient à conserver son secret jusqu'à sa rencontre fortuite avec le prince d'un château voisin (joué par un Jacques Perrin aussi charmant que puisse l’être un Prince Rouge (couleur qui évoque une dimension révolutionnaire). Une fois leur amour avoué et l'identité de la princesse révélée, les noces des deux jeunes gens sont célébrées dans l'harmonie retrouvée.... Servi par un superbe casting ou je rajoute Micheline Presle et Fernand Ledoux qui jouent des Reine et Roi aussi Bon que leur Royaume Rouge... Pierre Repp qui joue Thibaud, l'intendant et Henri Crémieux : le chef des médecins de ces derniers... et Sacha Pitoëff qui joue le Premier ministre du Royaume Bleu... le réalisateur apporte une esthétique « pop » a ce jolie conte en chanté sur une musique composée par Michel Legrand et une très belle direction artistique créé par Agostino Pace et Gitt Magrini (pour les costumes) et Jim Léon (pour les décors dont certains s'inspirent de Jean Cocteau (Les Statues et le choix de Jean Marais), Gustave Doré et Andy Warhol (le style vif et aux couleurs tranchées)...
Féerique, poétique et fantaisiste sont les trois superlatifs de cette œuvre unique qui pouvaient être signé par l'enchanteur Jacques Demy et son compositeur Michel Legrand qui nous livrent un conte de fée réaliste, psychanalytique ((le thème de l'inceste), ironique, anachronique (l'hélicoptère et le téléphone), social (la différence des classes et tout particulierement dans le défilé des prétendantes), féministe (les hommes sont capricieux tandis que les femmes des stratège (tout particulierement la Fée des Lilas qui est rancunière et calculatrice (superbe choix de l'actrice Delphine Seyrig pour le role ou elle est lumineuse) et ambigu... Enfin bref, ce film considéré comme une œuvre culte est le must du genre grâce à l'audace de ses thèmes et de son parti pris visuel.... qui s'achève sur les derniers vers du conte original sur une superbe narration de Jean Servais...

« Le conte de Peau d’âne est difficile à croire,
Mais tant que dans le monde on aura des enfants,
Des mères et des mères-grands,
On en gardera la mémoire. »