Long-métrage dont la direction artistique est signée Etienne Robial, ce film regroupe 6 courts signés d’auteurs aussi différents que talentueux, connus dans le monde de la BD pour leur expérience dans les univers graphiques. Blutch (découvert par Fluide Glacial et auteur entre autres d’albums comme Waldo’s Bar ou Peplum), Charles Burns (Black Hole chez Delcourt), Marie Caillou, Pierre Di Sciullo, Lorenzo Mattotti (Dr Jekyll & Mr Hyde avec Jerry Kramsky, Prix Will Eisner en 2003) et Richard McGuire composent ensemble l’équipe d’auteurs-réalisateurs à l’origine de ce projet ambitieux. Assistés par les scénaristes Jerry Kramsky, Michel Pirus et Romain Slocombe, ils offrent un film un peu hétéroclite mais qui remplit sa mission : faire (un peu) peur !

Les producteurs à la base du film sont très vite arrivés à l’envie de tout faire intégralement en noir et blanc. Un style qui convient bien aux univers des auteurs, même si certains se sont autorisés des nuances de gris… L’autre idée qui ressort de la vision du DVD est le découpage, 2 courts servant de fil rouge et d’enchaînements aux autres.

Alors que penser de ce film ? Du bien ! Si le fil rouge réalisé par Pierre Di Sciullo (un défilement d’images géométriques ajouté à la voix de Nicole Garcia) paraît sans grand intérêt, celui créé par Blutch est bien plus terrifiant, ses chiens tueurs et leur maître mystérieux étant une des plus grandes réussites de l’œuvre. Successivement suivent les histoires de Charles Burns (très kafkaïen, à réserver aux amateurs de terreurs adolescentes, de corps mutilés et d’insectes !), de Marie Caillou (sur un style japonais, peur des fantômes et des monstres), Lorenzo Mattotti (mon coup de cœur va à cette histoire nostalgique et intrigante, remplie de sous-entendus et de peurs réprimées) et Richard McGuire (dont le traitement graphique est certainement le plus beau et le plus abouti, malgré un scénario un peu inférieur aux autres).

Au-delà de l’image, les réalisateurs ont fait un travail admirable sur le son, source d’angoisse non négligeable pour accompagner le choc de l’image. Les musiques originales de Laurent Perez del Mar, Boris Gronemberger, René Aubry et George Van Dam assurent un soutien sonore qui renforce la puissance des dessins et sont pour beaucoup dans la réussite de l’ensemble du film.
Pour les doubleurs, le choix s’est aussi révélé judicieux, avec une mention particulière à Guillaume Depardieu, parfait dans son rôle. Aure Atika, un peu moins juste, Nicole Garcia et Arthur H. complètent les comédiens invités pour leurs voix.

Pour conclure sur le film en lui-même, difficile de dire que la peur est au rendez-vous, comme si les auteurs n’avaient pas souhaité aller trop loin dans leur démarche. Mais une grosse et saine angoisse se détache clairement de la vision de l’œuvre, et c’est dans ce domaine que ces dessinateurs excellent. C’est aussi plus efficace qu’une franche horreur !

Quant au DVD, il répond parfaitement à ce qu’on peut attendre du support : image parfaite (les nuances de noir et blanc sont parfaitement rendues), son excellent (à mettre fort en 5.1 pour profiter au maximum de l’expérience) et bonus. Parmi ces suppléments, un commentaire audio du directeur artistique Etienne Robial et du producteur Christophe Jankovic (on aurait peut-être préféré quelques interventions des auteurs), une trop brève visite de l’expo d’Angoulême, une « scène coupée » dispensable de Pierre Di Sciullo, les bandes-annonces et les biographies. A ne pas rater par contre, le diaporama décrivant les différentes étapes de création des films, aussi instructif que passionnant, et qui permet d’apprécier les diverses techniques utilisées par les créateurs.

Distribué dans le monde entier, les premières critiques anglo-saxonnes saluent de la même manière qu’en France ce film unique, véritable concept qui, à défaut d’être homogène, devrait titiller au moins une de vos peurs…
Gatcha
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le 31 août 2012

Modifiée

le 31 août 2012

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Gatcha

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