D'outre Tombe

[Festival du film coréen 2016 à Paris - Jury SensCritique]

Press c'est l'histoire d'un ouvrier bossant sans relâche, dont on ne sait pas grand chose. Il ne comprend rien à la société moderne qu'il l'entoure, comme si il venait d'y débarquer. Hors du temps, on lui parle d'inscription sur internet, il botte en touche, alors qu'il élabore lui-même chaque jour des tours d'unité centrales, grâce à la fameuse machine de « presse » d'où est tiré le nom du film.
Un homme désespérément seul, rejeté par l'unique« ami » qu'il connaissait et sa famille, mais néanmoins récupéré par une agente d’un programme d’entraide et de réinsertion lié à l’Église.
Ils passent du temps ensemble, elle lui apprend à se servir d'un smartphone, à ne pas se faire rouler par cette société marchande, récente, qui souhaite lui vendre des services dispensables.
Cette fille devient son moteur, son prophète, sa raison de vivre, sa gaieté retrouvée, son lien avec une société qu'il ne connait plus et qui le rejette. La main de Dieu en quelque sorte, en qui il commence à croire.

Il s'achète même une voiture pour prendre de l'indépendance et emmener son « amie» afin de mieux profiter de leurs moments ensemble.

Peut on être pardonné un jour sans passer par une justice sociétale et réglementaire ? C'est la question que pose le réalisateur au milieu du film pour ma part.
Dans ce monde où il ne connait et ne reconnait plus personne, il lui reste le boulot, faire du karaoké tristement seul, ou la mort. Il y perd la foi et sa raison de se battre, de vivre, d'être heureux. Malgré sa vaine tentative de se repentir.

Le final, sommaire d'apparence, m'a pourtant bouleversé :

« Press » a été un ascenseur émotionnel pour moi, qui aurait pu être réalisé à mon sens par Takeshi Kitano.
Le réalisateur a jonglé avec perfection avec mes sentiments. Tout d'abord une empathie intégrale pour cet homme, puis un mépris justifié, pour ensuite frissonner sur le final. Ce n'est pas lui le « fautif », mais tout ce qui l'entoure, qui veut sa mort, à jamais, malgré toute sa bonté.
« Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? », phrase de Jésus, m'est revenue sans cesse en tête, pour diverses raisons.
Et il est hélas difficile de critiquer ce film sans placer d'immondes rectangles gris.

Je regrette juste le manque de vécu entre l'agente et cet homme, et peut être une mise en scène bien trop plate. Il manque des moments forts, au moins visuellement, ce qui est bien dommage vu l'intelligence du film, que je recommande absolument malgré tout.