Mononoké Hime, princesse des esprits vengeurs.
J'avais très peur, en lançant Princesse Mononoké, d'être déçue d'une quelconque façon. Un doute, une méfiance à l'égard de ce sujet si complexe mais surtout si casse-gueule qu'est l'écologie au cinéma. C'était pourtant sans compter sur le génie d'Hayao Miyazaki, qui ici magnifie son message d'une métaphore mystique, de telle sorte qu'il dépasse la portée de son précédent Nausicäa.
Dès les premières minutes, j'ai été rassurée, happée par l'image d'abord enchanteresse du village d'Ashitaka, son calme et sa sérénité, rapidement heurtés puis détruits par un monstre en perdition. Nous sommes loin de Mon Voisin Totoro. Douze ans auparavant, il offrait aux japonais une image idyllique de leur forêt, et par un film doux et joyeux, tentait de sensibiliser la population à la protection de la belle flore de l'île. Ici, plus d'humour, plus de joie ; Miyazaki fait évoluer des personnages d'autant plus complexes qu'ils se heurtent à une situation laborieuse et tragique : la mort, et la disparition d'un monde. Il apparaît ainsi que Hayao s'éloigne de sa bonhomie usuelle au profit d'un propos sombre et moralisateur.
Plus encore, il cristallise nos peur dans son film, conte terrifiant et pessimiste qui pointe du doigt les hommes comme les destructeurs de la planète et blâme la haine et la guerre avant toute chose. Au temps des voitures électriques et des énergies naturelles, le message apparaît d'autant plus fort, notre réaction d'autant plus urgente. Son récit d'un conflit entre croyances ancestrales et égoïsme moderne, caractérisé par les dieux animaux anciens et les humains civilisés, bouleverse par son intensité.
Intensité honorée par la musique de Joe Hisaishi, particulièrement splendide ici puisque porteuse d'un souffle de vie qui met en exergue les sentiments des protagonistes : elle illustre l'horreur des combats, le cycle infini de la nature, le commencement d'un amour, tour à tour avec une dureté qui heurte ou une mélodie douce et chantante.
Ainsi Miyazaki prône par ce conte le respect de ce qui nous entoure, mais malgré son final empli d'espoir, le visage du petit Sirlin qui fait basculer sa tête dans un dernier plan, nous interrogeant du regard, semble non pas nous accorder sa confiance en l'avenir, mais nous exhorter à agir. Dans notre monde, ni sangliers géants ni dieux cerfs, garants de la vie et de la mort. Nous seuls pouvons accomplir les efforts nécessaires à notre protection et à celle de notre monde.