Au fil des années, à l'aide de plusieurs sites internet, de la presse spécialisée et j'en passe, j'ai toujours choisi méticuleusement les films pour lesquels je faisais le déplacement au cinéma. Pour une fois, on m'a emmené voir un long métrage en sortie nationale. Je ne connaissais rien de celui-ci, ci ce n'est que ce sera un biopic sur Marie Curie point barre. Je n'ai pas vu la B.A, et lu aucuns retours sur le film. S'asseoir dans la salle obscure, n'ayant aucune idée du spectacle fut une expérience galvanisante. Afin de retrouver cette délicieuse sensation de lâcher prise, c'est important de se laisser aller, de se laisser faire. Dans ce cas précis, j'ai accompagné une copine qui souhaitait le voir. Donc, oui c'est important, parfois. Mais hélas, ici non !


Le film cumule rapidement énormément de poncifs liés au genre. Il a cependant l'intelligence d'éluder l'enfance pour se concentrer sur Maria, fraîchement débarquée de Pologne et de sa rencontre cruciale avec Pierre Curie. On cerne l'essence de ce que fut le couple de scientifiques. Une alchimie rare entre deux êtres d'exception. D'ailleurs le film n'hésite pas à rappeler que Marie Curie était une personne arrogante et que seule, sa carrière était vouée à l'échec. On évite aussi d'appuyer lourdement avec un message #metoo anachronique malvenu tout en rappelant que Marie Curie fut le fer de lance d'une idée du féminisme. Très en avance sur son temps.


Il n'empêche, qu'en évitant le pire, le film ne fait pas beaucoup mieux et peine à proposer un film stimulant. La faute au casting 100% anglais refusant catégoriquement de s'exprimer dans la langue de Molière alors que l'ensemble du film se déroule à Paris. Pire, les origines polonaises pourtant évoquées de Maria, ne sont tout simplement pas retranscrites en dialogue. Les deux soeurs continuent de parler en anglais, et les flashbacks déjà très lourds pour surligner le trauma lié à l'enfance sont en anglais également. En 2020, c'est vraiment paresseux et très agaçant d'aller voir le film en V.O pour découvrir qu'aucun effort n'ai été fait sur ce sujet.
Pour terminer sur les choix de casting, j'ai un gros problème concernant l'interprétation de Rosamund Pike. Les scènes dramatiques sont encore surjouées à l'extrême. J'avais déjà remarqué cette exagération dans le très solide Hostiles de Scott Cooper, mais ici elle confirme cette tendance à la "performance" un peu agaçant et qui me bloque en terme d'empathie pour le personnage. David Fincher avait finalement su diriger son actrice d'une main de maître dans Gone Girl. L'exagération prenant alors tout son sens en le combinant à merveille au scénario malicieux.


En terme de reconstitution, on saluera le travail sur les costumes mais sinon , la succession d'intérieurs filmés platement ainsi que la photographie bleuâtre assez insipide et terne ont eu raison de moi.L'ennui s'est pointé rapidement pour ne plus me quitter.


Et coup de tonnerre !
Je découvre que Marjane Satrapi réalise ce produit aseptisé. Elle qui s'est toujours montrée facétieuse, dynamique et aux réussites multiples. Persepolis évidemment, très personnel et engagé. Mais j'avais également apprécié son Poulet aux Prunes co-réalisé avec Vincent Paronnaux. Et son virage US semblait plutôt réussi même si je n'ai toujours pas vu le film. Pourquoi s'enliser dans cette reconstitution boursouflée ?


Je me suis ensuite rappelé une scène de cauchemars / rêves qui m'avait sorti quelques temps de ma torpeur car il y avait une proposition assez forte. Et oui, quelques plans mêlant les époques et l'impact de sa découverte. Le cinéma se met à exister quelques temps pour casser les frontières temporelles et géographiques. Oui, des fragments de ce qui aurait pu être un grand film, hélas écrasés dans un académisme ronflant.
En espérant que Marjane Satrapi ne s'arrête pas à cette première coquille dans sa filmographie pour nous revenir avec quelque chose de plus inventif et enlevé.

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le 14 mars 2020

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Tchitchoball

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