Très intéressant parfois que de lire l'œuvre dont le film est adapté afin d'avoir une meilleure perspective. C'est précisément ce que j'ai fait avec « Rashômon », adapté de la passionnante nouvelle « Dans le fourré » du non moins passionnant Ryūnosuke Akutagawa. Si le résultat est en définitive très fidèle au texte de l'auteur, Akira Kurosawa a eu la grande intelligence de l'enrichir d'un point de vue narratif, si bien que l'ensemble garde une vraie personnalité. Mais ce qui frappe avant tout, c'est bien entendu l'impressionnante maestria visuelle qui caractérise pratiquement chaque plan. Nul doute qu'à ce titre, Maître Kurosawa était un véritable génie, offrant à l'œuvre un souffle, une puissance qui ne se dément jamais.
Conséquence : alors que l'histoire et le propos étaient déjà remarquables, « Rashômon » devient carrément somptueux à plusieurs reprises, la saisissante interprétation de chacun (Toshirō Mifune et Takashi Shimura en tête) ne faisant que renforcer ce sentiment. Reste un très léger aspect répétitif (mais pouvait-il être vraiment évité?) et donc une légère frustration me concernant quant à l'histoire connue dès le départ (c'est le risque dans ce cas-là), mais impossible pour autant d'oublier ce spectacle de premier ordre, aussi brillant qu'intelligent : une belle réussite.