Le vrai Chair de Poule

Au fond, quoi de mieux que l'alliance entre André Øvredal et Guillermo Del Toro pour adapter "Scary Stories", recueil d'histoires gentiment effrayantes à lire au coin du feu et au bestiaire farfelu ? Bon, inutile de s'étaler sur la carrière du deuxième dont l'aisance de conteur dans ce genre d'univers n'est plus à prouver mais, en ce qui concerne le premier forcément plus méconnu du grand public, on ne pourrait que vous conseiller le génial "Troll Hunter" l'ayant révélé et qui laisse à penser par son subtil dosage d'humour et d'épouvante et la représentation de son bestiaire nordique à la morphologie atypique qu'il est le bonhomme idéal pour s'attaquer à ce type d'adaptation visant un public forcément plus familial.
Car, oui, si vous avez un enfant prêt à découvrir son premier "vrai" film d'épouvante, "Scary Stories" est clairement ce qui pourrait se faire de mieux, parfait palier entre un "Chair de Poule" et un film pour un public plus adolescent (à vrai dire, c'est même ce à quoi aurait dû tendre une véritable adaptation des bouquins de R.L. Stine quelque part).
Et, si vous-même avez encore vos yeux d'enfant, la première partie du film ne va avoir aucun mal à vous séduire. Ambiance de petite ville américaine à la fin des 60's, soirée d'Halloween, héros ados stéréotypés, méchants ados stéréotypés, etc... Tout est là pour une sympathique ambiance old school de virée en maison hantée et c'est exactement ce que le film a la bonne idée de faire avec un beau passage rempli de savoureux frissons à la clé.
Quand le fonctionnement du livre à histoires se révèle, "Scary Stories" fait illusion un temps avec les événements qui en découlent (les premières manifestations des courtes nouvelles sont franchement amusantes) puis le regard d'adulte reprend très vite le dessus devant un cheminement qui, lui aussi, s'enfonce dans la caricature. On se raccroche alors à quelques parallèles plutôt bien pensés et qui élève le film dans des directions loin d'être bêtes (les convergences des conditions de l'héroïne et de l'esprit maléfique principal, l'ombre d'une Amérique sacrifiant sciemment sa jeunesse pour la Guerre du Vietnam) mais, à ce stade, la mécanique est devenue beaucoup trop rigide pour créer la moindre surprise et notre intérêt s'amenuisera dans une dernière partie hélas bien plus banale. Ceci dit, le film saura toujours se révéler un minimum efficace et notre pressentiment quant au choix judicieux du réalisateur de "Troll Hunter" pour cette adaptation vis-à-vis de la multiplicité de créatures ne cessera de se vérifier.
Peut-être que le plus grand défaut de "Scary Stories" est donc de ne pas réussir à nous faire conserver notre âme enfantine durant sa deuxième partie à cause d'un déroulement trop convenu mais force est de reconnaître qu'il aura au moins réussi brillamment à la réveiller le temps de ses prémices. Dans tous les cas, si vous recherchez un film pour passer une bonne soirée d'Halloween en famille, c'est à mettre dans le haut de la liste.